Violences conjugales
La violence conjugale est un cycle
La notion de cycle de la violence dans les couples a été introduite en 1988 par la psychologue américaine Leonor Walker et reprise ensuite par la chercheuse québécoise Ginette Larouche.
Ce modèle permet d’appréhender la dimension temporelle des violences conjugales et d’expliquer comment s’instaure l’usure des repères et la victimisation.
Dans ce modèle, le cycle de la violence se compose de quatre phases bien distinctes : la tension, la crise, la justification et la rémission ou lune de miel.
L'escalade de la violence : un continuum
La violence s’installe progressivement dans le couple.
Elle passe tout d’abord inaperçue, car les premières manifestations ne sont pas brutales et peuvent être confondues avec des preuves d’amour (jalousie, repli sur le couple, etc.)
De la part du conjoint violent, la violence commence souvent par des agressions psychologiques, de l’isolement et du contrôle visant à réduire l’estime de soi de la victime. Apparaissent ensuite les agressions verbales, physiques et sexuelles.
La fréquence et la gravité des agressions augmentent avec le temps, pouvant mener jusqu’à l’homicide ou au suicide. Les phases du cycle sont de plus en plus rapprochées. Lorsque la domination est bien installée, le couple peut même ne plus passer par la phase de rémission. Certains conjoints violents ne font pas usage de violences physiques, mais installent un climat de peur, de terreur, qui aura finalement les mêmes répercussions sur le plan psychologique et moral.
Le point de vue de la victime et celui de l'auteur
Durant les phases de tension, de désaccord ou de conflit, l’auteur cherche à conserver le contrôle sur l’autre et sur la situation. Les frustrations seront vécues comme des échecs. L’auteur à tendance à ruminer, à se replier. Par son silence et ses stratégies d’emprise, l’auteur contribue à faire monter la tension.
La victime, quant à elle, sent la tension monter. Elle a peur et se replie sur elle-même. Elle cherche à se conformer le plus possible aux attentes de son compagnon.
La phase d’explosion par le recours à la violence n’est pas une perte de contrôle, mais, au contraire, le moyen ultime pour retrouver le contrôle sur l’autre et exercer son pouvoir. Dans un tout premier temps, cette explosion va d’ailleurs avoir un effet de soulagement chez l’auteur.
Le point de vue de la victime et celui de l'auteur
Dans la troisième phase du cycle, l’auteur peut se sentir honteux ou mal à l’aise face à ses comportements et va chercher à s’en déculpabiliser en rejetant la faute sur l’autre. Il va, à la fois, justifier ses comportements et culpabiliser la victime. L’auteur va exprimer des regrets et expliquer ses comportements violents par toute une série de causes extérieures à lui : l’alcool, des problèmes médicaux, des problèmes financiers, la belle-famille, etc.
Il peut également minimiser les conséquences de ses actes et convaincre la victime qu’elle est responsable de l’incident (« Tu sais bien que quand tu fais ça, ça me rend dingue et tu le fais quand même. Tout ça c’est de ta faute »).
Quand la victime adhère aux justifications de l’auteur, elle se sent coupable, faible et pas à la hauteur. Ce discours de regrets et de justifications va s’accompagner parfois de gestes de pardon (bouquet de fleurs et cadeaux, dîner aux chandelles, week-end en amoureux, etc.), mais également de bonnes résolutions (concernant l’alcool, le travail, etc.) et de promesses. S’instaure alors une phase de rémission ou de lune de miel où la victime se sent reconnue, aimée, elle reprend alors espoir et se culpabilise d’avoir porté plainte.
Le cycle recommence après quelques jours, semaines, voire plusieurs mois
La femme va s’accrocher aux moments privilégiés vécus pendant la période de rémission et se les rappellera lors de nouveaux faits de violence. Les agressions deviennent, pour elle, des faits isolés, tandis que les périodes de rémission sont la généralité. Ce voile qui occulte la réalité est un mécanisme de défense qui lui permet de survivre et d’espérer encore.