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Soumission chimique : les dessous d'un conte sociétal des sexualités viriles.

Episode 1- Peur pour les filles, perversité pour les agresseurs, le « vrai » et le « faux » viol : chacun est à sa place, que les jeux commencent !

Image par Lucija Rasonja de Pixabay

Depuis 2021 et le #balancetonbar, la soumission chimique a régulièrement fait la une des médias. Ceux-ci se sont d’abord focalisés sur la dénonciation du GHB, appelée « drogue du violeur » ou « drogue du viol » et sur les lieux festifs de la nuit. Mais depuis quelques mois, suite à deux procès retentissants, la soumission chimique revient en force à la une en modifiant les paramètres. Il y a eu l’affaire de Dominique Pélicot et des (plus de) 50 violeurs, et celle du sénateur Joël Guerriau, qui a drogué la députée Sandrine Josso après l’avoir invitée chez lui pour fêter son élection dans le but de l’agresser sexuellement. Ces deux histoires, suivies par d’autres prises de parole de victimes, obligent la société et les médias à admettre que les violeurs ne sont pas forcément des inconnus, de dangereux pervers tapis dans l’ombre d’un bar malfamé, et que la soumission chimique dans le but d’agresser sexuellement est bien plus répandue qu’on ne l’imagine. Voilà une belle avancée dans la déconstruction des stéréotypes et préjugés qui fondent nos perceptions du viol, donc un pas vers la possibilité de mesures efficaces pour lutter contre les agressions sexuelles facilitées par les drogues.

Mais malheureusement, ce n’est pas suffisant pour mettre réellement à mal ce que l’on appelle « la culture du viol », dont la soumission chimique est une arme, pas une cause. Comme l’hydre de Lerne, cette créature gigantesque à 9 têtes de la mythologie grecque, le sexisme et la culture du viol ont la particularité de voir deux têtes repousser dès qu’on leur en coupe une. Et le traitement médiatique de la soumission chimique et du viol se contente de couper une ou deux têtes de la bête en admettant que le violeur qui drogue sa victime pour arriver à ses fins peut être connu de la victime, voire son mari, qu’il peut être un homme socialement respecté, et même un père de famille sans problèmes apparents. Le reste du mythe qui différencie un « vrai » viol d’un « faux » viol, qui délimite ce qui est « excusable » ou « acceptable » en termes de violences sexuelles, ce qui est de la faute de la victime qui l’a bien cherché ou pas, sont autant de têtes toujours bien vivaces et garantes de la repousse en double de celles tranchées. Tant qu’on ne s’attaque pas à l’ensemble des violences sexistes et sexuelles sous toutes leurs facettes, à leurs origines et pas uniquement à leurs manifestations, le mythe se réadaptera. Et c’est ce qui se passe dans le choix des affaires médiatisées à l’heure actuelle.

D’un côté, à la une, on trouve des récits de soumission chimique qui font froid dans le dos. Ils parlent de « phénomène en augmentation vertigineuse », de « drogue du viol » ou « du violeur », d’inconnus dangereux qui scrutent les jeunes filles dans les lieux de fêtes, ou d’agresseurs sexuels connus de la femme victime mais pas trop familiers, comme un collègue, un commerçant, un ami d’amis. Ou alors, si c’est dans le couple, des agresseurs « à la personnalité clivée », « au schéma d’une totale perversité », à « tendances nécrophiles », comme sera décrit Dominique Pélicot[1]. Les victimes, elles, sont honnêtes, « blanches comme neige » pour la plupart, moralement irréprochables, sournoisement piégées par des hommes sans scrupules. Exit les aspects incestueux, pédophiliques, de maltraitance infantile ou de personnes âgées, le gentil couple ou celui en séparation, le huis-clos familial le plus majoritairement rencontré, parfois mentionnés, jamais analysés. De l’autre côté, la vulnérabilité chimique est à peine abordée, éclipsée sous le poids de la violence si manifeste de la soumission chimique.  Les victimes des agressions sexuelles par vulnérabilité chimique, contrairement à celles droguées à leur insu, sont des filles et des femmes qui boivent et/ou prennent des drogues volontairement. Les violeurs sont plus souvent des « opportunistes » qui ne « préméditent » pas, mais profitent simplement de femmes à la respectabilité douteuse. Vous le voyez venir, le « vrai » viol mis en scène par les médias, et l’évitement des indices qui décrédibiliseraient l’existence de « faux » viols ? Voyons comment les médias invisibilisent les agresseurs, diffusent la peur et reportent l’attention sur tout sauf sur l’essentiel : la culture du viol et les scripts sexuels des masculinités viriles.

La soumission chimique présentée comme un « phénomène » récent qui s’amplifie : panique pour les filles et occultation d’un long passé en lien avec la « culture du viol »

 « C'est un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur en France : la soumission chimique. Des femmes qui sont droguées à leur insu pour être abusées sexuellement. Une émission pour alerter, prévenir et sensibiliser »[2]. Le vocabulaire choisi par cette émission diffusée sur France 2 et la tournure des phrases ne laisse aucun doute : sensationnalisme et diffusion de la peur sont au rendez-vous. Et c’est donc ce qui s’inscrira dans l’inconscient des spectateurices, même si Leïla Chaouachi, pharmacienne au centre d’addictovigilance de Paris et experte nationale sur l’enquête « soumission chimique » auprès de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM), contredira cette affirmation quelques minutes à peine après le début de l’émission : non, les soumissions chimiques n’augmentent pas forcément de manière exponentielle. Si les chiffres explosent entre 2021 et 2022 en France, c’est principalement parce que la culture du signalement augmente[3]. Dès l’automne 2021, le mouvement européen de libération de la parole #balancetonbar #MetooGHB amène une vague de signalements sans précédent, qui s’engouffrera dans la brèche de la réouverture des discothèques en février 2022, après la pandémie « covid »[4]. Et c’est une bonne chose. On peut dire merci de cette avancée aux hashtags cités, mais aussi au courage de Gisèle Pélicot et de sa fille, Caroline Darian, dont les actions permettront à cette vague de se transformer en véritable injonction à une réelle prise de conscience par la société et les pouvoirs publics : la soumission chimique est un fait de société massif, encore largement sous-estimé. Mais qui ne date pas d’hier.

Dès la fin des années 90 et le début des années 2000, un grand nombre de recherches sur le sujet fleurissent aussi bien aux USA qu’en France[5], où Questel et al. qualifient déjà en 2000 les soumissions chimiques comme « un problème de santé publique »[6]. Mais l’usage de drogues à des fins d’agressions sexuelles ne date pas de cet intérêt médico-légal, ou même des nombreuses recherches féministes dans les années 70 et 80. Y croire ce serait comme envisager que les violences conjugales n’existaient pas avant que les féministes ne s’y intéressent. Les drogues existent depuis l’usage des plantes médicinales, à la préhistoire. Dans certaines contrées, les chamans utilisent l’ayahuasca ou yagé, ailleurs l’opium, la feuille de coca, ou encore le cannabis[7]. Le haschisch est utilisé par les médecins dans l’Islam médiéval, et la cocaïne révolutionne le traitement de la douleur à la fin du XIX siècle[8]. Et bien sûr, il y a l’alcool, la drogue sans doute la plus répandue[9]. Le détournement de leurs usages médicaux ou encore spirituels à des fins d’agressions sexuelles est sans doute concomitant aux découvertes de leurs vertus[10].

Le fantasme de s’emparer du corps inerte de femmes endormies, de « pénétrer » son intimité et de prendre possession totalement et absolument de ce corps sans défense est, quant à lui, au moins aussi vieux que les récits mythologiques de l’Antiquité. Ainsi Hypnos, le Dieu grec du sommeil, n’hésite pas à profiter de son pouvoir pour violer des femmes inanimées, ou encore Dionysos enivre-t-il Nicée pour la violer dans son sommeil[11].  Les contes, romans et autres littératures jalonnent l’histoire de récits de belles endormies violées par des hommes. Par exemple, les versions originales de l’histoire de La Belle au Bois Dormant, que ce soit le conte Soleil, Lune et Thalie (1634) de l’Italien Giambattista Basile ou le roman Perceforest (1340), qui regroupe des récits sources d’inspiration pour les auteurs de contes européens et les romanciers, vont bien plus loin qu’un baiser dérobé. 

A chaque fois, la jeune fille endormie est violée, tombe enceinte et enfante dans son sommeil (de jumeaux dans le cas du conte). L’enfant cherchant à téter aspire l’écharde de lin responsable de l’endormissement, réveillant ainsi la jeune femme qui découvre qu’elle est … maman[12]

The Sleeping Beauty (1899) par Henry Meynell Rheam (1859-1920)

Le conte de Giambattista Basile conclu que « À qui a de la chance/ Le bien vient même en dormant »[13]. Une vision à tout le moins très masculine de ce qu’est la chance… Les œuvres d’art, qu’il s’agisse de peinture, de sculpture, de cinéma, etc. ne sont pas en reste[14].

Dire que les cas de viols par soumission chimique sont récents et en pleine explosion, outre de propager la peur chez les femmes, permet de faire l’impasse sur la longue histoire qui se cache derrière. Les violeurs ont usé de toutes les armes possibles de longue date, se cachant derrière cet ensemble « d'attitudes et croyances généralement fausses, mais répandues et persistantes, permettant de nier et de justifier l’agression sexuelle masculine contre les femmes » appelé « culture du viol » [15].  A l’instar de Muriel Salmona, nous ajouterons que cette définition est valable pour toutes les victimes d’agressions sexuelles : femmes et hommes, adultes et enfants, même si les femmes et les filles sont largement majoritaires[16]. Ce que révèle l’agression sexuelle par soumission chimique n’est pas un mal uniquement contemporain, mais un mode d’agression faisant partie d’un schéma de domination sexiste et sexuelle vieux comme le monde et présent partout dans ce même monde, sous des formes parfois encore plus violentes et bestiales, comme dans les agressions sexuelles sur des femmes issues des (anciennes) colonies[17]. L’invisibilisation de l’histoire de la culture du viol et la diffusion de la panique chez les femmes sont des stratégies, souvent inconscientes (mais pas toujours…), qui protègent les agresseurs. Une autre de ces stratégies est l’invisibilisation des agresseurs. C’est ce qui se joue dans la focalisation sur la drogue GHB, ou encore dans des appellations comme « drogue du violeur » ou « Affaire des viols de Mazan ».

GHB, « Drogue du viol », « Affaire des viols de Mazan » : mettre le focus sur tout ce qu’on veut, mais pas sur les agresseurs.

Fin de l’année 2021, les médias ont saisi l’occasion du #balancetonbar pour faire du sensationnalisme et semer la panique dans les bars fréquentés par les jeunes et dans les boites de nuit.  Des agressions sexuelles avaient lieu après avoir vidé de la drogue dans des boissons pour faciliter le viol. Il fallait bien sûr en parler, mais il aurait fallu en parler réellement. Au lieu de ça, les médias ont titré à tout va en ciblant le GHB, appelé unanimement la « drogue du viol » ou « drogue du violeur ». « Le GHB, une drogue du viol, difficile à déceler, inodore, incolore et insipide »[18] titre Le Soir en novembre 2021 ; « #Balancetonbar: la menace du GHB plane sur les établissements de nuit »[19] surenchérit RTL quelques jours plus tard ; « Le GHB, la drogue du crime parfait"[20] lance la RTBF en décembre. Le coupable ? Le GHB. Et oui, le coupable c’est la drogue, pas le violeur ! Effacés de toutes les attentions, les agresseurs sont bien moins mis sur la sellette que l’arme qu’ils ont utilisée, et encore cette arme est-elle réduite à un nom spécifique. Or le GHB ne concerne qu’au maximum 9 à 10% des cas des drogues utilisées dans la soumission chimique, il est loin derrière d’autres substances bien plus communes[21]. Les drogues les plus couramment utilisées sont les médicaments comme les anxiolytiques (les benzodiazépines : Xanax, Alprazolam, Lexomil, Temesta, etc.[22]) et les sédatifs, notamment les analgésiques (comme le Tramadol), des drogues très facilement prescrites. Ils sont suivis de près par les drogues qui ne sont pas des médicaments, avec en tête la MDMA (ecstasy), le cannabis ou encore la cocaïne, et cela un peu partout dans le monde[23]. En réalité, le GHB n’a été utilisé que dans 4 cas sur les 82 soumissions « vraisemblables » recensées en 2021 en France par l’enquête de l’Agence Nationale de sécurité du médicament[24].

D’où vient l’appellation « drogue du viol » ? C’est une traduction approximative de « Date Rape Drugs » (« les drogues du viol du rencart »), venu du concept de « date rape » mis en avant par des féministes dans les années 80 aux USA[25]. L'enjeu de leurs études était déjà de démontrer que le violeur n'est pas forcément un inconnu noir surgit d’un coin sombre d’un parking ou de derrière un bosquet, ce qui correspond au stéréotype raciste très ancré dans les représentations du viol aux Etats-Unis à cette époque. Il peut être un « homme du même milieu, de même couleur, le plus souvent connu voire intime, [et même] un potentiel futur mari »[26]. En 1987, la psychologue Mary Koss mène une grande enquête dans près de 35 campus américains, qui va montrer que 84% des victimes connaissent leur agresseur, et 57% des viols ont lieu dans le cadre d’un premier rendez-vous, « date » en anglais. Parfois, puisqu’il s’agit de rendez-vous dits « amoureux », les agressions sexuelles ont lieu après avoir bu de l’alcool ou pris des psychotropes, les drogues du viol (Date Rape Drugs)[27]. Aux Etats-Unis comme ici, le « Date Rape Drug » est tourné au sensationnalisme autour d’une seule drogue. Les médias invisibilisent toute la lutte pour montrer la proximité du violeur et la banalité du viol pour parler du GHB, la « drogue du viol »[28].

Photo de Raimond Klavins sur Unsplash

Pourquoi avoir ciblé le GHB spécifiquement ?  Le GHB n’est pas LA « drogue du viol », c’est juste un somnifère utilisé en anesthésie et dans le traitement de la narcolepsie. Seulement il a des effets euphorisant, relaxant et désinhibant à faible dose, qui va attirer l’attention des milieux festifs dans les années 90[29].

Concrètement, ses effets sont proches de ceux de l’alcool, mais en accéléré, avec « la particularité d’augmenter la motivation sexuelle, l’envie et le désir » selon le Dr Koumar[30]. Les victimes vont avoir l’apparence de personnes qui ont envie d’avoir des relations sexuelles, ce qui se retourne contre elles[31], que ce soit aux yeux des potentiels agresseurs, de la société ou encore de la Justice. Tout le monde est vite prompt à condamner une femme qui se comporte de manière sexuellement désinhibée. En plus, c’est une arme parfaite, car invisible : elle disparaît en 6 à 12 dans les urines et le sang. Enfin, elle a pour effets de donner du mal à penser et à bouger, et la mémoire n’enregistre plus. Elle est souvent prise en association avec de l’alcool, qui est un neurotoxique qui empêche le sommeil paradoxal, là où les souvenirs s’ancrent dans le cerveau. Le résultat : un blackout[32]. Une arme incolore, inodore, indétectable, qui donne l’illusion de victimes consentantes et ne leur laisse pas de souvenirs, ou peu. Difficile de trouver mieux pour faire flipper, non ?

Mettre le focus sur l’arme, et mieux, sur une arme parfaite, c’est aussi (et surtout) éviter de parler des violeurs. Appeler le procès de Dominique Pélicot et des (autres) 50 violeurs condamnés « l’Affaire des viols de Mazan », c’est encore éviter de parler des agresseurs et des victimes. « On scotomise [rejeter inconsciemment hors du champ de la conscience une réalité pénible, Le Robert] les agresseurs, on scotomise les victimes pour mettre en avant un pauvre village »[33]. Mazan n’est certainement pas un lieu pire que les autres, mais le voilà stigmatisé, classé dans l’inconscient collectif comme central dans une histoire sordide de viols. Qui étaient les violeurs ? Et comment se fait-il qu’autant d’hommes aux profils variés aient bandé à l’idée de violer une femme inconsciente offerte par son mari ? Tout cela n’est pas central, les agresseurs n’apparaissent pas dans le titre, ils sont secondaires. L’important, c’est le lieu. « Ça montre à quel point les médias sont complices de la culture du viol »[34]. Et puis, comme l’a dit un avocat de la défense, « il y a viol et viol »[35]… pourquoi centrer l’attention sur des agresseurs qui ne sont, peut-être, que des victimes de Dominique Pélicot, le seul vrai violeur, le monstre, le pervers, lui-même victime de sévices dans l’enfance ? Et là, nous entrons dans la sphère du mythe du « vrai viol » et du « faux viol », au centre de la culture du viol.

En quoi le traitement médiatique des agressions sexuelles facilitées par les drogues, qui a l’air de remettre en question l’image du violeur inconnu, armé, la bave aux lèvres, inspirant la terreur, n’attaque-t-il pas réellement les représentations collectives et profondes de ce qu’est un « vrai viol » ? C’est ce que nous allons voir au travers du traitement différent qu’occupent les agressions sexuelles facilitées par la soumission chimique et celles facilitées par vulnérabilité chimique dans nos médias et débats.

Soumission chimique vs vulnérabilité chimique : le mythe du « vrai viol » et du « faux viol »

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Les agressions sexuelles facilitées par les drogues recouvrent deux réalités différentes, liées par une arme commune, mais qui ne sont certainement pas perçues de la même manière par la société : la soumission chimique et la vulnérabilité chimique. La soumission chimique, c’est quand on vous drogue à votre insu, ou sous la menace, donc clairement sans votre consentement, et ensuite on commet un crime ou un délit, le plus souvent un viol. C’est Hypnos qui endort ses victimes pour les violer. Mais quand Dionysos fait boire Nicée pour l’agresser sexuellement, on parle de vulnérabilité chimique. Ce sont les situations au cours desquelles on a consommé volontairement une substance (alcool, ecstasy, cannabis, cocaïne…) qui nous rend plus vulnérable à une agression[36]. Un peu partout dans le monde, depuis très longtemps, il y a plusieurs techniques directes ou indirectes utilisant l’alcool ou les drogues pour altérer le consentement : inciter l’autre à boire en remplissant son verre sans son avis, offrir des alcools forts, etc. L’alcool est un énorme facteur de vulnérabilité chimique[37]. Dans les deux cas, il s’agit d’une agression, et en aucun cas la victime n’est coupable.

Les agressions sexuelles facilitées par la soumission chimique font la une des médias depuis quelques années, par contre, on parle très peu de celles facilitées par la vulnérabilité chimique. Or, elles sont bien plus fréquentes et concernent quasi exclusivement des femmes (dans 90% des cas, selon l’enquête de 2022 de l’Agence nationale de sécurité du médicament)[38]. Les victimes, des filles et des femmes âgées de 13 à 69 ans, avec une majorité dans la vingtaine, ont bu ou pris de la drogue volontairement. Les lieux de fêtes sont en tête de liste des endroits où se déroulent les agressions, même si dans de nombreux cas les victimes sont emmenées par leur(s) agresseur(s) dans un autre lieu. Agresseur(s) qu’elles connaissent par ailleurs le plus souvent, contrairement aux idées reçues. Vous voyez arriver les stéréotypes et préjugés qui entourent le viol ? Dans les représentations collectives tenaces du viol, le « vrai viol », c’est celui commis par un inconnu, de préférence d’origine étrangère, armé, dans une rue déserte, sur une jeune femme séduisante[39]. Or ici, on a une femme qui boit et/ou se drogue, qui suit peut-être « volontairement » un mec qu’elle connait, qui ne s’enfuit pas forcément, voire ne se débat pas.

« La consommation de drogues, qu’elle soit volontaire ou involontaire, modifie les comportements des victimes, affecte leurs perceptions et capacités à analyser les situations et leur dangerosité, à prendre des décisions, à se défendre, à exprimer leur consentement ou leur non-consentement, et à demander de l’aide. Elle peut même mener à la perte de conscience et/ou à une amnésie temporaire ou permanente »[40]. La victime se sent vulnérable, ne se rappelant pas bien ou pas du tout les évènements, perdue, déboussolée. Elle n’a pas forcément opposé de résistance physique violente, crié un « non » clair et catégorique, eu le réflexe de prendre la fuite, perçu le danger et a peut-être suivi « de plein gré » un homme (ou des hommes) dans sa voiture, chez lui, dans les toilettes. Elle risque de ne même pas s’identifier elle-même comme victime d’agression sexuelle, ou d’avoir peur de ne pas être crue par les autorités, voire d’être blâmée[41]. Si ce cas de figure concerne aussi les victimes d’agression sexuelle par soumission chimique, les victimes ont « l’excuse », socialement parlant, d’avoir été piégées sournoisement, elles n’y sont au fond pour rien. Mais si elles ont volontairement consommé de l’alcool et/ou des drogues, alors la sentence sociale et judiciaire sera qu’elles l’ont bien cherché, c’est de leur faute[42]. Si elles ont suivi délibérément un homme chez lui, c’est qu’elles le voulaient bien. « Dès lors que l'agression ne respecte pas l'archétype [du « vrai » viol], la victime en supporte souvent les conséquences et se voit infliger le blâme : elle l'a mérité ou elle l'a cherché. C'est ce que l'on qualifie, plus communément, de « mythes autour du viol »[43]. Parler davantage des agressions sexuelles facilitées par la vulnérabilité chimique, ce serait s’attaquer au mythe de la « bonne victime » et de la « mauvaise victime ».

La culture du viol transmise par la société et les médias nous laisse donc avec des « vraies » et des « fausses » victimes, mais aussi avec des victimes qui s’ignorent[44]. Notamment les victimes se trouvant dans « la zone de reddition »[45] : le rapport sexuel n’est ni désiré, ni accepté, ni voulu, mais il ne se manifeste pas par des résistances stéréotypées, la victime ne se débat pas, ne crie pas, n’appelle pas à l’aide.  La victime subit sans accepter[46]. Quand l’agression a lieu dans le couple, ou lors d’un « date » (rendez-vous, « rencart »), l’intégration du « sentiment de droit » (« sens of entitlement ») vient s’ajouter à l’empêchement de la reconnaissance du viol. Ce « sentiment de droit » est le sentiment des hommes, dans leurs rapports aux femmes, que toute chose leur est due, de manière spontanée et évidente » [47]. Quand un homme profite de l’état prononcé d’ébriété ou d’emprise d’une drogue de « sa » femme à peine consciente, ou de son « date » (rencart), « il cherche à obtenir ce qui lui est légitimement dû, ce qui leur revient de droit, l’accès aux corps des femmes »[48]. Même s’il la connait à peine, un homme estime être en droit d’être récompensé sexuellement pour avoir offert quelques verres et/ou raccompagné une fille ou une femme jusque chez elle. C’est ce qu’on appelle la « dette sexuelle » [49]. Il ne se perçoit donc pas comme un agresseur, d’autant plus que le discours validé par la société est que les hommes auraient simplement tout le temps envie de sexe. Selon les termes de la psychologue Nicola Gavey, « Les hommes sont les sujets du discours sur les pulsions sexuelles ; les femmes en sont les objets.  C’est-à-dire que les hommes sont toujours prêts pour le sexe, et ce sont les femmes (ou les corps des femmes, ou les images du corps des femmes !) qui activent cet intérêt »[50].

Les femmes ne font que répondre à ces discours. Ayant intégré que le rapport sexuel est un dû dans le couple, voire un dû si on a accepté des cadeaux ou un service d’un homme qu’on apprécie un minimum, elles auront du mal à percevoir que leur non-désir, voire leur inconscience ou conscience altérée au moment du rapport sexuel, est le signe du viol[51]. Le « viol ordinaire », celui qui n’ébranle pas l’ordinaire, ne rompt pas avec lui, commis dans le couple, lors d’un « date », ou encore par « dette sexuelle », n’amène pas forcément les victimes à montrer le visage attendu par la société et la justice.Ces viols-là ne mettent pas inévitablement en jeu des violences entrainant des séquelles physiques, ou de profonds traumatismes. « C’est parce qu’il s’inscrit dans cet ordinaire, ce banal de la vie quotidienne, dans la proximité avec l’autre, le conjoint, que le viol ne touche rien, ne change rien, et n’est parfois même pas discuté »[52]

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Ou parce qu’il s’inscrit dans le discours du « sentiment de droit » des hommes, de celui sur les « pulsions sexuelles masculines » et de « la dette sexuelle ». 

On est loin de l’image collective transmise par les films et romans du « vrai viol », où la jeune victime est soit détruite par le viol, éventuellement vengée par un homme « juste », soit elle cherche à se venger elle-même violemment (style de films appelé « rape and revenge »)[53]. Et ceci constitue un autre marqueur de la « vraie victime » et de la « fausse victime »[54].

Aux stéréotypes de la victime idéale ou de la « vraie victime » s’ajoute celui du « vrai violeur », ou violeur monstrueux[55]. Dans les récits médiatiques sur la soumission chimique, même si l’agresseur est connu des victimes, il reste monstrueux puisqu’il drogue sa victime sournoisement pour la violer. Il y a donc préméditation, à tout le moins il est « pro-actif », il sait ce qu’il fait. Il est identifié comme un dangereux prédateur, et doit être punis très sévèrement par la justice et la société. Mais quand un agresseur profite d’une femme saoule et/ou sous l’emprise d’une drogue, c’est seulement un « opportuniste ». Il n’a fait que profiter de la situation, il ne l’a pas provoquée lui-même, il n’avait pas l’intention... « Il y a viol et viol »[56]. Par opposition à la catastrophe du « vrai viol », le viol « d’opportunité », exercé sur une victime qui s’est enivrée ou droguée, sera minimisé, voire inexistant[57]. L’agression sexuelle facilitée par la vulnérabilité chimique, en s’écartant de la victime parfaite, voire de la victime tout court, et du violeur qui prémédite son crime, permet aux quatre piliers principaux de la culture du viol de s’enclencher[58] :

  1. Le Victim blaming, ou blâmer la victime pour son viol (par exemple, « elle l'a voulu », « elle l'a mérité »). L’idée qu’au fond, « elle l’a bien cherché » ;
  2. Nier le viol, se montrer incrédule à l'égard des allégations de viol (par exemple, « la victime ment », « son accusation est injustifiée ») ;
  3. Excuser l'agresseur (par exemple, « il n'a pas pu contrôler sa libido ») ;
  4. Faire allusion au fait que seuls certains types de femmes sont violées ( Les filles qui s'habillent de manière provocante, qui sortent trop, ont trop d’aventures sexuelles, etc.).

Les agressions sexuelles facilitées par la vulnérabilité chimique sont donc invisibilisées par les médias parce qu’elles mettent en danger le mythe du « vrai » viol. D’un côté elles mettent en jeu des victimes qui ne sont pas identifiées par la société, voire par elles-mêmes, comme de « vraies victimes ». D’un autre elles présentent des agresseurs qui ne sont pas identifiés par la société, voir par eux-mêmes, comme des « vrais violeurs ». Du coup, s’il n’y a ni vraie victime ni vrai agresseur, il n’y a pas « vrai viol ».  La notion de viol « d’opportunisme » constitue à ce titre le parfait argument en soi. Réduisant le viol à une « occasion saisie », il ne permet pas de penser l’acte de domination qu’est le viol, ni la décision consciente des agresseurs sexuels de faire passer leurs besoins et désirs avant l’intégrité de la victime. Il passe outre la préméditation, d’avoir repéré sa victime, d’avoir attendu le bon moment, d’avoir volontairement créé une « dette sexuelle », d’avoir mis en place les conditions pour créer cette soi-disant « opportunité », pour faire passer l’idée d’un gars qui ne fait que saisir une bonne occase. L’intégrité de la victime devient anecdotique. La soumission chimique, elle, fait la une des médias en présentant de « vraies » victimes, souvent blanches, aux bonnes mœurs, en colère et/ou brisées, et de « vrais violeurs », pervers, prédateurs, préméditant leur agression sexuelle, donc reconnus comme bien conscients de ce qu’ils font. Oui, mais est-ce vraiment ça la réalité de la soumission chimique ? Ou là encore, les médias omettent-ils d’autres pans de la réalité ?

Soumission chimique, inceste, pédocriminalité et violences intra-familiales : l’occultation du continuum des violences patriarcales

 « Des étudiantes droguées en soirée pour être violées, c’est ce qu’on imagine le plus souvent », commente une animatrice d’émission de télévision française, faisant écho aux représentations stéréotypées collectives sur le sujet[59]. Si les affaires présentées par la presse comme celles de Sandrine Josso ou de Gisèle Pélicot ruinent en partie ce cliché, elles sont loin de la réalité déjà détectable dans les chiffres de l’enquête française de l’Agence nationale de sécurité du médicament de 2022[60]. On y découvre que si les jeunes filles dans la vingtaine sont les plus nombreuses (avec une médiane à 24 ans), les victimes de soumission chimique ont entre… 9 mois et 90 ans. Sur les 97 victimes recensées, 23 sont mineures, soit un peu moins d’1/4 des victimes, et 15 ont moins de 15 ans ! Alors que la vulnérabilité chimique concerne essentiellement les filles et femmes de 13 à 69 ans, la soumission chimique, elle, englobe tous les âges, du nourrisson à la personne âgée. Les femmes et les filles restent majoritaires, elles représentent ensemble 82,5% des cas, mais les hommes et les garçons sont davantage des victimes que dans la vulnérabilité chimique. Pourquoi drogue-t-on des bébés, ou encore des personnes de plus de 80 ans, des filles et des femmes surtout, mais aussi des garçons et des hommes ?

Pour les agresser sexuellement, dans 62,9% des cas. Ce qui soulève la question de l’inceste et de la pédocriminalité. La soumission chimique s’exerce principalement dans les lieux privés, et non dans les lieux de fête. A la maison (c’est le cas pour presque tous les enfants de moins de 15 ans), chez un membre de la famille, chez un ami, dans une institution... par des agresseurs de tous types de profils, de toutes classes socio-économiques[61]. Ainsi, les chiffres nous apprennent que dans la réalité, le plus souvent le viol est commis par un proche, chez lui ou chez soi, et dans bien des cas sur une mineure. "Ce n'est pas dans la rue en rentrant d'une soirée qu'une femme est le plus en danger d'être violée, c'est quand elle est enfant, chez elle, dans sa famille, à l'école, dans le cadre de ses activités parascolaires, dans les institutions de soins, ou quand elle est adulte dans son couple ou au travail »[62]. Les garçons aussi sont des victimes potentielles, bien que dans une moindre mesure, puisqu’ils représentent un peu moins d’1/5 des cas connus. Les médias omettent, ou ne font qu’effleurer, les relents incestueux et pédophiliques de la soumission chimique. Et ce malgré l’insistance de certaines intervenantes pour en parler, comme Caroline Darian ou Muriel Salmona, qui rappelle dans une émission radio à quel point on détruit les enfants, et combien il faut les écouter et les croire[63]. Exit aussi les profils de victimes pourtant identifiés qui ne correspondent pas au mythe du viol, et qui présentent des « facteurs de vulnérabilité supplémentaires » : celles et ceux qui abusent d’alcool ou de drogues, celles et ceux déjà victimes d’abus sexuels, souffrant de troubles psychiatriques, d’handicaps divers, de précarité, en fugue, prostitué·e·s[64]

Mais la soumission chimique n’est pas une arme utilisée uniquement dans le cadre des agressions sexuelles. Il reste 37,1% de cas où les motifs sont différents, parmi lesquels : le vol, la maltraitance chimique d’enfants ou de personnes âgées, la violence physique, la séquestration, la traite humaine, les chantages lors de séparations[65], ou encore pour calmer un conjoint qui exige trop souvent des relations sexuelles, donc non désirées[66]. On ne peut pas faire l’impasse sur l’amplitude des profils des victimes, que ce soit en termes d’âge, de sexe, de genre, de type de violences ou même de classe socio-économique. La soumission chimique n’est pas qu’une arme pour agresser sexuellement des femmes, c’est une « arme patriarcale »[67], qui s’exerce aussi bien pour violer des enfants (les siens ou d’autres), pour battre chimiquement, parfois physiquement, des enfants, des adultes ou des personnes âgées, pour voler ou pour faire du chantage dans le cadre d’une séparation. Or, les agressions par soumissions chimiques qui ont d’autres visées que celles sexuelles sont littéralement effacées des récits médiatiques.

Exit donc les violences conjugales et intrafamiliales, les agressions homophobes ou transphobes par haine, les chantages dans la garde d’enfants, etc. Comme si les autres violences de domination n’existaient pas. Ou comme s’il n’existait aucun lien entre les violences sexuelles et toutes ces autres formes de violences.

Les médias parlent enfin de « culture du viol », dont la journaliste Susan Brownmiller mentionnait déjà l’existence en 1975 en dénonçant une société où les violences sexuelles sont minimisées, justifiées, pardonnées, allant parfois jusqu'à être soutenues. Mais dans son ouvrage « Against Our Will: Men, Women and Rape » (« Contre notre gré : les hommes, les femmes et le viol »), cette écrivaine ne séparait pas le viol des autres violences sexistes. Elle démontrait plutôt que le viol est « le symptôme le plus évident et le plus brutal d’un rapport de force entre hommes et femmes, et qu’il constitue l’exercice d’un pouvoir plus que d’une jouissance »[68]. La culture du viol participe au continuum des violences patriarcales, qui regroupe toutes les violences que les femmes subissent de la naissance à la mort, dans lequel sont regroupées des catégories de violences qui peuvent être extrêmement différentes[69]. Il n’est donc pas étonnant de retrouver l’arme de la soumission chimique dans toutes les formes de violences machistes, pas uniquement les violences sexuelles.

Les rapports de pouvoir de sexe et de genre sont régulés par la domination masculine, dans tous les domaines, professionnel, sexuel, amoureux, sportif, etc., et cela dans l’espace privé comme dans l’espace public. Toutes les tactiques d’occultation des violences masculines, sexuelles ou autres, dans la société ou dans le couple, visent au déni ou à la légitimisation des agresseurs et des violences[70]. Selon Patrizia Romito, il existe 6 tactiques d’occultations, communes à toutes les formes de violences sexistes[71] :

  1. L’euphémisation. Toutes les façons de dire qui omettent de préciser le caractère sexiste d’une violence et invisibilisent les agresseurs.
  2. La déshumanisation des victimes. Par la (pédo)pornographie, qui montre la femme ou l’enfant comme un objet, les réduit à un corps, mais aussi par les insultes et l’humiliation des victimes.
  3. La culpabilisation des victimes. Les femmes battues provoquent les coups, les jeunes filles incestuées se comportent comme des « Lolitas », les femmes violées sont habillées trop court, l’ont bien cherché. Les mères sont responsables des violences que leurs mecs infligent aux enfants, elles mentent, elles manipulent les enfants, les instrumentalisent.
  4. La psychologisation. Avec l’invention de notions et concepts flous ou infondés comme le « syndrome d’aliénation parentale »[72]. Un problème social est transformé en traits de comportement individuels.
  5. La naturalisation (ou essentialisation). C’est « biologiquement » fondé, que ce soit la place de la femme à la maison, où les hommes qui ont des pulsions sexuelles incontrôlables. Fonds de commerce du sexisme et du racisme, elle sert à dénier le côté modifiable de certains comportements. C’est comme ça, c’est tout.
  6. La compartimentation des violences. Séparer les différentes formes de violences, c’est empêcher de les penser dans leur continuité, et d’identifier des agresseurs communs.

Non, le viol n’est pas le seul crime où les victimes sont culpabilisées et les agresseurs dédouanés[73]. L’inversion de la culpabilité est au cœur de toutes les violences masculines : les victimes de violences dans le couple évoquent toutes la honte et la culpabilité (c’est de leur faute, elles n’ont pas bien fait, etc.), les enfants aussi (j’ai énervé papa, je n’ai pas été sage, etc.), la justice et la société peinent à les reconnaitre comme victimes, les enfants incestué·es ont intégré honte et culpabilité, etc. Même dans les violences économiques, les femmes qui prennent un mi-temps pour s’occuper des enfants, des personnes âgées ou handicapées de la famille, se sentent coupables de ne pas ramener beaucoup d’argent à la maison, seront pénalisées pour leurs pensions, perdront sans doute tout en cas de séparation, et porteront la culpabilité pour tout ça. Même si la plupart de ces violences ne sont pas à proprement parlé des crimes mais des délits, voir rien du tout, selon le code pénal du moins, insister sur le viol comme étant l’unique point de retournement des responsabilités entre victimes et auteurs participe à l’invisibilisation du continuum des violences patriarcales. Compartimenter les violences, c’est une tactique qui sert les agresseurs.

Séparer les violences sexuelles par soumission chimique de l’inceste, de la pédocriminalité, mais aussi de la violence conjugale et intrafamiliale, c’est s’empêcher de comprendre les violences masculines dans leur ensemble et de trouver les actions adéquates pour lutter contre[74]. C’est se vouer à protéger les victimes, à punir les agresseurs et former les professionnel·les concerné·es à détecter et prendre en charge les victimes, toutes choses vitales, mais qui se concentrent sur les symptômes sans jamais aborder l’origine du mal : un système sociétal qui concerne tout le monde, le patriarcat, basé sur les masculinités hégémoniques. Tenter de couper une tête de l’hydre ne suffit pas à tuer l’hydre, c’est le cœur qu’il nous faut viser.

Le cœur de l’hydre

Avant de partir à la découverte de ce qui se cache sous le caleçon du mythe des chevaliers servants et des croquemitaines, faisons le récapitulatif de ce que les silences et cachotteries des médias nous ont appris de la réalité. 

Tout d’abord, même si une vigilance s’impose, rien ne sert de paniquer : malheureusement la soumission chimique existait bien avant qu’on en parle, et sans doute dans les mêmes proportions. La seule différence depuis 2021, c’est que maintenant nous en avons conscience, nous pouvons donc mieux détecter les signes suspects et mieux réagir. Vous trouverez en fin d’étude, dans la seconde partie, un encadré reprenant les gestes à poser si vous soupçonnez avoir été drogué·e. Mais c’est dans les lieux privés, à l’abri des regards, souvent dans le huis-clos familial ou du couple, que se déroulent la majorité des agressions facilitées par la soumission chimique, qu’elles soient sexuelles ou autres. Si vous vous posez des questions sur vos relations de couple, n’hésitez pas à consulter le Violentomètre ou le Queer violentomètre ci-dessous, de supers outils pour situer dans quel type de relation vous êtes et pouvoir identifier d’éventuels indices que « quelque chose ne va pas tout à fait ». Les bars et autres lieux de fêtes sont davantage des lieux où des mecs pourraient vouloir profiter de l’ébriété ou prise de drogue volontaire d’une potentielle victime, pour tenter de l’approcher et l’inviter à les suivre. Quel que soit le cas de figure, rester solidaires avec les copains et copines est une bonne stratégie, que ce soit durant la soirée ou au moment du retour. La sortie de soirée constitue un moment privilégié pour les potentiels agresseurs, surtout les « opportunistes », qui soi-disant ne préméditent pas le viol mais savent quand-même attendre le bon moment et repérer les personnes les plus « attaquables ». Ce n’est donc pas encore le moment de se désolidariser du groupe, mieux vaut rentrer à plusieurs (et pas juste avec un vague copain de copain rencontré lors de la soirée).

Et puis, nous ne sommes pas nées pour être victimes, contrairement à ce que le monde tente de nous faire croire. Les garçons sont poussés à apprendre à se défendre, à attaquer aussi, depuis le plus jeune âge. La société les encourage à prendre leur place sans céder à la peur, les invitant à apprendre un art martial, à faire de la boxe, du Krav-maga ou encore du rugby, alors qu’elle décourage les filles à faire de même. Selon le jugement sociétal, une fille qui réagi elle-même à un p’tit gars qui lui a soulevé la jupe dans la cour de récré de primaire ne se comporte pas comme il faut : elle aurait dû pleurer et appeler un·e adulte, sans doute pour se faire entendre dire qu’il faut qu’elle arrête de jouer au foot avec les garçons aussi, elle ferait mieux de s’exercer à la corde à sauter avec les copines. Le problème n'est pas d'apprendre à la petite fille que la violence ne résout rien, mais bien la double norme : le taux de tolérance de la société aux violences n'est pas le même pour les filles et les graçons. Ce n’est pas sans raison : la place des filles et des femmes est celle de soumises, une des meilleures stratégies est donc qu’elles aient peur de la violence, qu'elles se sentent impuissantes, inaptes à se défendre, tandis qu'une certaine violence est acceptable pour les garçons, voire valorisée (il s'est bien défendu!). Ce n’est pas de notre faute si nous cédons parfois à la peur, il n’y a aucune culpabilité à avoir : toute la société nous y pousse, et les médias, comme nous venons de le voir, rajoutent en permanence au sentiment d’insécurité des filles et des femmes. Mais ce n’est pas une fatalité. Nous aussi pouvons apprendre à dépasser la peur, à augmenter notre confiance en nous et en notre corps, à aiguiser nos réactions face au danger, qu’il soit verbal ou physique.  Nous pouvons apprendre à booster notre sentiment de sécurité et à mieux assurer nous-même notre sécurité réelle. Pour cela, il y a tous les sports de combat et de défense, bien sûr.

Mais si vous ne vous en sentez pas capable ou l’envie, pour quelque raison que ce soit, ou même si vous le faites déjà, il y a aussi les cours d’autodéfense pour femmes du CVFE à Liège, ou ceux de Garance à Bruxelles, entre autres. Accessible à toutes les femmes, jeunes ou âgées, valides ou handicapées, l’autodéfense féministe est un bon moyen de créer des solidarités féminines et de s’émanciper ensemble.

Enfin, nous avons vu comment les viols sont légitimés, voir déniés par notre société. Les victimes sont culpabilisées, les agresseurs invisibilisés ou assimilés à de simples « opportunistes » sexuels, l’arme présentée comme si elle était l’agresseur. Et que les agressions sexuelles font partie d’un grand tout, d’un système, le patriarcat, ce qui permet de comprendre que le viol n’est pas une question de plaisir sexuel pour les agresseurs, mais bien de domination. Pourquoi tant de stratégies et tactiques pour maintenir le mythe du viol intact ? Que cherche-t-on désespérément à invisibiliser, de quoi détourne-t-on notre attention ? Spoiler Alert : ce que les médias et la société nous empêchent d’analyser par tous ces tours de passe-passe, c’est le cœur de l’hydre, la formation même de ce qui rend possible la culture du viol : un conte sociétal des sexualités viriles. Un conte aux sexualités hétérosexuelles et andocentrées pour les garçons et les hommes comme pour les filles et les femmes, c’est-à-dire où les sexualités, finalement, sont des outils de compétition et de mesure pour les hommes et entre les hommes. Les femmes, elles, ne sont que des objets d’enjeux, éventuellement de récompense, des instruments qui départagent les hommes.

Pour en savoir plus, c’est par ici, dans l’Episode 2 : les arcanes du conte des sexualités viriles (A venir)

Notes

[1] Soumission chimique : elles ont été droguées pour être violées, émission Ça commence aujourd'hui, diffusée sur France 2 (France Télévisions), 09/01/2024, 42:08  https://youtu.be/lANynDoWZHk?si=ZYHFz_yV7DGMPD3b ou, entre autre, Emmanuelle Jowa, "Tous les hommes ne sont pas des violeurs mais n'importe lequel peut en être un", nous dit Danièle Zucker, psychologue, profileuse formée au FBI, Paris Match.be, 30/11/2024

[2] Id.

[3] Dr. Chaouachi L., Soumission chimique - Enquete 2022, Document réalisé par le CEIP-A de Paris avec le soutien de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament).

[4] Danièle Marcovivi, Interview des Dr. Ghada Hatem-Gantzer et Dr. Leila Chaouachi : Lutter contre les violences sexistes et sexuelles – Focus sur la soumission chimique - Fondation RAJA, 07/10/2024

[5] Pépin G., Aspects analytique, toxicologique, judiciaire de la soumission chimique : dix ans d’expérience, Annales Pharmaceutiques Françaises, Volume 68, Issue 2, Mars 2010, p. 61-75 https://doi.org/10.1016/j.pharma.2010.01.002

[6] Questel F. et al., Soumission médicamenteuse : 4 ans d’expérience aux UMJ de Paris, J Med Leg Droit Med, 2000, cité dans Pépin G, Aspects analystique (…), op.cit.

[7] Samaille M., La soumission chimique, état des lieux, mutations, prévention et perspectives, DUMAS - Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, Mémoire en Sciences pharmaceutiques, Université de Grenoble-Alpes, 2021, p.10-11

[8] Pointeau-Lagadec E., Où en est (et où va) l’histoire des drogues en France ?, dans Histoire, médecine et santé, Revue d’histoire sociale et culturelle de la médecine, de la santé et du corps, 26/Hiver 2024, p.9-17.

[9] Morel A., Chapitre 1 : Histoire, dans Morel A. et Couteron J.-P. (sous la dir.), Aide-mémoire – Addictologie, Dunod, 2019, p.1-13.

[10] Id.

[11] Le fantasme de la belle endormie, ou comment le viol imprègne notre culture, France Culture, 29/11/2024 https://youtu.be/cK5Szi-9ZKM?si=nbD1HyTatZM8t-1K

[12] Aragon S., Notre littérature, avec ses « belles endormies », fait-elle l’apologie du viol ?, The Conversation, 13/10/2024

[13] Telling M.,  Le viol de femmes dans leur sommeil habite l’histoire de l’art, de la mythologie jusqu’au cinéma, HuffPost, 29/09/2024

[14] Pour en savoir plus sur le « male gaze » et la nécessité de relire/revoir les œuvres avec un nouveau regard, incluant la vision des femmes, voir l’analyse d’Anne Delépine, Violences conjugales, péril intime, Collectif Contre les Violences Familiales et l'Exclusion (CVFE asbl), novembre 2024 CVFE - Violences conjugales, péril intime

[15] Définition de Lonsway et Fitzgerald en 1994, donnée par M. Salmona, Pour en finir avec le déni et la culture du viol en 12 points, janvier 2016, réactualisé en septembre 2020, p.3 Articles de la Dre Muriel Salmona

[16] M. Salmona, Pour en finir avec le déni et la culture du viol en 12 points, janvier 2016 réactualisé en septembre 2020, p.3 Articles de la Dre Muriel Salmona

[17] J. Falquet, Chapitre 5 : Le quadruple continuum des violences. Apports féministes matérialistes et décoloniaux à l’analyse de la violence, à partir des féminicides en Abya Yala, dans : Bodiou L. et al., (sous la Dir.), On tue une femme. Histoire et actualités du féminicide, Hermann, 2019, pp 129-148. 2019- “Le quadruple continuum des violences. Apports féministes matérialistes et décoloniaux à l’analyse de la violence, à partir des féminicides en Abya Yala” – Jules Falquet

[18] Wauters L., Le GHB, une drogue du viol, difficile à déceler inodore, incolore et insipide, Le Soir, 17/11/2021

[19] AFP, #Balancetonbar: la menace du GHB plane sur les établissements de nuit, RTL Info, 27/11/21

[20] Le GHB, 'la drogue du crime parfait', RTBF Actus, 21/12/21

[21] Naomi Titti et Tal Madesta, Soumission chimique : il n’y a pas de “drogue du violeur”, Les Couilles sur la table, Binge Audio #104, enregistré le 31 octobre 2024, 06:30

[22] De victime à médecin, elle sensibilise sur la soumission chimique, France tv, 21/01/2025, 02:18 https://youtu.be/Lcgwu--45Bw?si=QEX8SDThSrgp3dlN

[23] Poulsen H., McCarthy M.-J., Baker J., et al., Toxicological assessment of the role of alcohol and drugs in drug-facilitated sexual assault cases in New Zealand. Journal of Analytical Toxicology. 45(1), 2021, p. 44–52 https://doi.org/10.1093/jat/bkz110; Kapitány-Fövény M., Zacher G., Posta J., Demetrovics Z., GHB-involved crimes among intoxicated patients, Forensic Science International. 275, 2017, p.23–29 https://doi.org/10.1016/j.forsciint.2017.02.028; Tiemensma M., Davies B., Investigating drug-facilitated sexual assault at a dedicated forensic centre in  Cape Town, South Africa, Forensic Science International. 288, 2018, p.115–122. https://doi.org/10.1016/j.forsciint.2018.04.028; Hagemann C.T., Helland A., Ethanol and drug findings in women consulting a Sexual Assault Center –Associations with clinical characteristics and suspicions of drug-facilitated sexual assault, Journal of Forensic and Legal Medicine. 20(6), 2013, p.777–784 https://doi.org/10.1016/j.jflm.2013.05.005

[24]Durieux J., GHB, viols, discothèques... 5 choses à savoir sur la soumission chimique, Le Figaro, 02/09/2024

[25] Félix Lemaitre, La nuit des hommes. Une enquête sur la soumission chimique, éd. JC Lattès, 2024, p.44

[26] Eric Fassin, Le Date rape aux Etats-Unis. Figures d’une polémique, dans Enquêtes, n°5, 1997, cité par Elvire von Bardeleben, «Date rape» : le rendez-vous marqué, Libération, 21/08/2015

[27] Koss, M. P., Gidycz, C. A., & Wisniewski, N., The scope of rape: Incidence and prevalence of sexual aggression and victimization in a national sample of higher education students, Journal of Consulting and Clinical Psychology, 55(2), 1987, p.162–170

[28] Interview de Félix Lemaître dans Naomi Titti et Tal Madesta, Soumission chimique : il n’y a pas de “drogue du violeur”, Les Couilles sur la table, Binge Audio #104, enregistré le 31 octobre 2024, 13:37

[29] Samaille M., La soumission chimique, état des lieux, mutations, prévention et perspectives, DUMAS - Dépôt Universitaire de Mémoires Après Soutenance, Mémoire en Sciences pharmaceutiques, Université de Grenoble-Alpes, 2021, p.20

[30] Félix Lemaitre, La nuit des hommes (…), op.cit., p.38

[31] Voir ou écouter le cas édifiant de Vanessa B. et le verdict de 2005 à Anger innocentant les 3 violeurs, pour raison que la victime se comportait de manière « sexuellement libérée » dans le podcast Soumission chimique (…) op.cit, 10:55 ou Félix Lemaitre, La nuit des hommes (…), id., p.38

[32] Id., p.41

[33] Emmanuelle Piet, médecin, présidente du Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV), Affaire Pelicot : que dit le procès des viols de Mazan de notre société ? Blast-info, 9/12/24, 0:08:33 https://youtu.be/vkWgFEQAbD8?si=DzPjxxet2ysISxAD

[34] Id.

[35]Campion J., "Il y a viol et viol" : au procès de Dominique Pelicot et de ses 50 coaccusés, la défense déclenche la colère de la victime et de sa famille, France Info, 10/09/2024

[36] Soumission chimique et vulnérabilité chimique, Arrêtons les violences, site du gouvernement français de lutte contre les violences sexistes et sexuelles 

[37] Calacs, Pourquoi l'alcool est-il la véritable drogue du viol ?, Gazette de la Mauricie, 10/07/24

[38] Chaouachi L., Soumission chimique - Enquete 2022, Document réalisé par le CEIP-A de Paris avec le soutien de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament)

[39] Salmona M., Violences sexuelles. Les 40 questions-réponses incontournables, 2ème éd., Dunod, 2021

[40] Violences sexuelles facilitées par la consommation de drogues, Eurotox asbl, 09/05/2022

[41] Anderson, L., Flynn, A. & Schumann, J., A global epidemiological perspective on the toxicology of drugfacilitated sexual assault: A systematic review, Journal of forensic and legal medicine. 47, 2017, p. 46-54. https://doi.org/10.1016/j.jflm.2017.02.005

[42] Abou Mansour L., Vulnérabilité chimique : « Pas envie qu’on me dise que je n’aurais pas dû boire »… La double peine des victimes, 20 minutes.fr, 22/10/24

[43] Renard, N., Mythes autour du viol, 12/02/2012. Blog Antisexisme.net de Noémie Renard, autrice du livre En finir avec la culture du viol,éd. Les Petits Matins, 2021  Mythes sur les viols. Partie 1: Quels sont ces mythes ? Qui y adhère ? – Sexisme et Sciences humaines – Féminisme

[44] Trovato, N., Et si c’était Amber Heard qui avait vécu ça ? : étude de cas d’un processus de co-catégorisation de la violence sexuelle « ordinaire » sur Twitter – Discours et (violences de) genre [carnet de recherche], 05/08/2024

[45] Guérin A., Qualifier, témoigner, dénoncer le viol ordinaire : la justice réparatrice comme espace de justice épistémique, Theses.fr [Thèse de doctorat, Paris, Institut d’études politiques], p.129

[46] Trovato, N., Et si c’était Amber (…) op.cit.

[47] Décrit par la philosophe Kate Manne, Entitled : How Male Privilege Hurts Women, Penguin Books Limited, 2020, citée par Trovato, N. Et si c’était Amber (…), op.cit.

[48] Guérin A., Qualifier, témoigner, dénoncer le viol ordinaire : la justice réparatrice comme espace de justice épistémique, Theses.fr [Thèse de doctorat, Paris, Institut d’études politiques], p.68-69

[49] Le sentiment de « dette sexuelle », c’est se sentir redevable d’une quelconque activité sexuelle sous prétexte d’avoir reçu un service ou un cadeau. Les garçons et les hommes savent que lorsqu’ils offrent des verres et raccompagnent une fille ou une femme chez elle, ils créent une « dette sexuelle ». Charlotte Bernard, Qu'est-ce que la dette sexuelle et comment se débarrasser de ce sentiment qui nous pourrit la vie ?, Madmoizelle, 02/04/2023

[50] « Men are the subjects of the male sexual drive discourse; women are its objects. That is, men are always-already ready for sex, and it is women (or women’s bodies, or images of women’s bodies!) who activate this interest ». Extrait de Gavey, N., Just sex? The cultural scaffolding of rape, éd. Routledge, 2019 (seconde édition), p.99

[51] Trovato, N., Et si c’était Amber (…) op.cit.

[52] Id.

[53] La Belle et la meute de Aala Kaf Ifrit (2017), Millénium de Niels Arden Oplev (2009), Irréversible de Gaspar Noé (2002), Les Accusés de Jonathan Kaplan (1988), Le Retour de l'inspecteur Harry de Clint Eastwood (1983), L'Ange de la vengeance de Abel Ferrara (1981), Taxi Driver de Martin Scorsese (1976), Un justicier dans la ville de Michael Winner (1974), Crime à froid de Bo Arne Vibenius (1973), entre autres.

[54] Trovato, N., Et si c’était Amber (…), op. cit.

[55] Tilton, E. C. R., Rape Myths, Catastrophe, and Credibility. Episteme, 2022, p.1‑17 https://doi.org/10.1017/epi.2022.5

[56] La défense des certains accusés du procès de Dominique Pélicot et des plus de 50 violeurs qui ont profité de l’inconscience de Gisèle Pélicot pour la violer s’oriente en partie sur cette question de soi-disant « non préméditation », ou « non conscience de violer », alors même qu’ils devaient se laver les mains à l’eau chaude pour ne pas la réveiller, ne devaient pas porter de parfum, devaient se déshabiller dans la pièce d’à côté, se garer à distance, etc. Preuves qu’ils savaient très bien ce qu’ils faisaient, qu’il y a préméditation. Il y a des stratégies, comme dans le viol dit « d’opportunisme ». Repérer une fille ivre ou droguée est une stratégie qui dénote une préméditation. Emmanuelle Piet, médecin, présidente du Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV), Affaire Pelicot : que dit le procès des viols de Mazan de notre société ? Blast-info, 9/12/24, 19:13 https://youtu.be/vkWgFEQAbD8?si=DzPjxxet2ysISxAD

[57] Voir le concept du double processus de minimisation/catastrophisation des viols de la philosophe Emilie Tilton, Rape Myths, (…), op.cit.

[58] Bohner, G., & al., Rape myth acceptance : congitive, affective and behavioural effects of beliefs that blame the victim and exonerate the perpetrator, In: Horvath, Miranda A. H. and Brown, Jennifer M., eds, Rape: Challenging contemporary thinking, Willan Publishing, Cullompton, pp. 17-45.

[59] Soumission chimique : elles ont été droguées pour être violées, émission Ça commence aujourd'hui, diffusée sur France 2 (France Télévisions), 09/01/2024, 02:04 https://youtu.be/lANynDoWZHk?si=ZYHFz_yV7DGMPD3b

[60] Chaouachi L., Soumission chimique - Enquete 2022, Document réalisé par le CEIP-A de Paris avec le soutien de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament)

[61] Leila Chaouachi, dans l’émission Soumission chimique : elles ont été droguées (…), op.cit., 2:10

[62] Salmona M. , Pour en finir avec le déni et la culture du viol en 12 points, janvier 2016, réactualisé en septembre 2020, p.3   Articles de la Dre Muriel Salmona

[63] Viol sous soumission chimique : comprendre la mémoire traumatique, France Culture, 14/09/24 à partir de 23:33 https://youtu.be/yBB5U1u6ai8?si=mlyD4EfzYzswgRRS

[64] Chaouachi L., Soumission chimique - Enquête 2022 (…), op.cit.

[65] Comme cette femme droguée par une « amie », violée et filmée pour la faire chanter dans le cadre de son divorce : Soumission chimique : comment combattre "le crime parfait", France Culture, 04/10/2024, 03:40

[66] Id. et Pépin G., Aspects analytique, toxicologique, judiciaire de la soumission chimique : dix ans d’expérience, Annales Pharmaceutiques Françaises, Volume 68, Issue 2, Mars 2010, p. 61-75 https://doi.org/10.1016/j.pharma.2010.01.002

[67] Terme utilisé par Naomi Titti dans le podcast Soumission chimique (…) op.cit.

[68] Susan Brownmiller, Le viol, éd. Stock. Compte-rendu, Cahiers du GRIF, 1977, n°16, p. 110

[69]Christelle Taraud, Historienne, dans Procès de Mazan : la culture du viol devant la justice, France Culture, 12/09/2024, 19 :15 ; ou encore C'est quoi, la soumission chimique? - rts.ch - Monde (Radio Télévision Suisse), émission Le Point J, 12/09/2024

[70] Lucie Goderniaux, Le continuum des violences patriarcales. Une réalité à prendre en compte, dans Chronique féministe, juillet/décembre 2015, n°116, p. 23-26

[71] Patrizia Romito, Un silence de morte, éd. Syllepse, 2006

[72] Le Syndrome d’aliénation parentale, ou SAP, est un concept sans fondement scientifique introduit par le psychiatre Richard A. Gardner au début des années 1980. « Le sap serait présent dans les cas de divorce ou de séparation et serait souvent accompagné de fausses accusations de violence sexuelle sur mineurs. Un des parents, presque toujours la mère, « programmerait » les enfants, à travers une sorte de lavage du cerveau, de façon à ce qu’ils dénigrent le père, détruisant ainsi progressivement la relation père-enfant ». Souvent évoqué dans les instances judiciaires, par des psychologues ou encore auprès de services comme les SAJ/SPJ, ce concept qui n’a aucune validité scientifique abouti parfois au placement d’enfants qui dénoncent des violences physiques et/ou sexuelles auprès de leur agresseur, considérant que les enfants mentent et sont manipulées par les mères. Patrizia Romito et Micaela Crisma, Les violences masculines occultées : le syndrome d'aliénation parentale, EMPAN 2209/1 n°73, p. 31 à 39 https://shs.cairn.info/revue-empan-2009-1-page-31?lang=fr

[73] Florence Porcel, victime de PPDA, autrice du livre Honte (éd. J.-C. Latès, 2023) insiste lourdement sur le fait que le rejet de la culpabilité sur la victime, pour un crime, ça n’existe que pour le viol. Emission Comment la société protège les violeurs, Blast-info, 08/03/2023, 11:45 https://youtu.be/lFCX9Knhezg?si=pI3929a5bfuX_iWm

[74] Lucie Goderniaux, Le continuum des violences patriarcales (...), op.cit.

Pour citer cette étude

Nathalie Collignon, Soumission chimique : les dessous d'un conte sociétal des sexualités. Episode1 : Peur pour les filles, perversité pour les agresseurs, le « vrai » et le « faux » viol : chacun est à sa place, que les jeux commencent !, Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE asbl), mars 2025.

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