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À propos des luttes des femmes palestiniennes : interview avec Sandrine Mansour

Dans cette analyse, nous interviewons la chercheuse franco-palestinienne Sandrine Mansour afin de proposer un éclairage sur la situation en Palestine, à travers le prisme des luttes des femmes palestiniennes. Nous y discutons de la manière dont les luttes pour les droits des femmes et les luttes pour la libération nationale sont intimement liées. Nous abordons également les difficultés rencontrées par ces femmes dans ce contexte particulièrement violent.

Pour télécharger notre analyse

En ces temps particulièrement difficiles pour la communauté palestinienne, en tant qu’association de lutte contre les violences faites aux femmes qui œuvre à une société plus juste, il nous a paru essentiel d’apporter un éclairage sur la situation. Pour cela, nous avons choisi d’aborder le sujet à travers le prisme des luttes des femmes palestiniennes.

Nous avons ainsi rencontré Sandrine Mansour, chercheuse franco-palestinienne et militante pour la libération du peuple palestinien, qui travaille sur la diaspora féminine palestinienne et sur les mouvements de femmes au Levant1, dont le mouvement des femmes palestiniennes. Dans cette interview, elle nous démontre comment les luttes pour les droits des femmes sont indissociables des luttes pour la libération du peuple palestinien.

 

Quelques informations clés pour comprendre la situation

Dès la fin du 19ème siècle, des volontés de créer l’État d’Israël en Palestine émergent et se font connaître. Au sortir de la seconde guerre mondiale, en 1947, l’Assemblée Générale des Nations Unies approuve ce projet et en 1948 l’État d’Israël est proclamé sur une partie des territoires palestiniens. En 1949, a lieu ce que les Palestinien-ne-s nomment la “Nakba” (la “catastrophe”), Israël s’étend au point qu’il ne reste que 23% de la Palestine historique : plus de 700 000 Palestinien-ne-s sont contraint-e-s à l’exil.

Depuis 1947, de nombreux événements ont éclaté, les plus importants étant la guerre de 6 jours en 1967 et les deux intifadas (“soulèvements”), la première de 1987 à 1993, la deuxième de 2000 à 2005. Ces évènements ont été suivis par la perte de nouvelles terres ainsi qu’au durcissement de la militarisation et des conditions de vie des Palestinien-ne-s, Israël invoquant son droit à la défense contre une population perçue comme terroriste.


 
Carte issue du site : https://www.francetvinfo.fr/vrai-ou-fake/vrai-ou-faux-ces-cartes-montrant-la-reduction-progressive-du-territoire-de-la-palestine-sont-elles-trompeuses_6156030.html

Comme nous pouvons le constater sur les cartes, la population palestinienne, marquée par l’exil, vit de manière morcelée : une partie de la population vit en Israël et possède la citoyenneté israélienne
2, une autre partie vit en Cisjordanie, et une autre encore à Gaza. En ce qui concerne les Palestinien-ne-s qui ont quitté le pays, ou descendant-e-s des personnes qui ont quitté le pays, la plupart vit dans des camps de réfugiés mis en place dans les pays voisins3, en attendant leur “droit au retour” (environ 6 000 000 de Palestinien-ne-s se voient ce droit, pourtant reconnu par l’Assemblée Générale des Nations Unies, refusé). Ces lieux de vie impliquent différents statuts et réalités, mais, si les Palestinien-ne-s n’ont pas tou-t-es la même expérience de la colonisation4, il nous faut comprendre que celle-ci est centrale dans leurs “conceptions et expériences” (Taraud : 2022).

Depuis sa création, Israël a été condamné à de nombreuses reprises pour son non-respect du droit international en raison, notamment, du blocus illégal imposé à Gaza, de l’installation, encouragée par les politiques publiques, de nouvelles colonies, pourtant illégales, en Cisjordanie, de son non-respect du droit au retour des réfugiés, etc. Plusieurs associations, comme Amnesty International, dénoncent ce régime comme étant un système d’apartheid5. En effet, la privation de droits fondamentaux et des libertés à laquelle sont confronté-e-s les Palestinien-ne-s, la restriction de leurs déplacements (une centaine de checkpoints et 700km de murs en Cisjordanie enferment les Palestinien-ne-s dans des zones militarisées6), la fragmentation et la dépossession des terres ainsi que le refus de délivrer des permis de construire à des Palestinien-ne-s démontrent l’institutionnalisation du système de domination qu’ils et elles subissent.

Comme nous allons le voir, ce régime d’apartheid et cette militarisation du quotidien ont des conséquences désastreuses sur la population palestinienne, et notamment sur les femmes. Mais comme nous allons également le voir, malgré les difficultés, le peuple palestinien n’a jamais cessé de lutter pour ses droits et pour sa libération.


Que peux-tu nous dire sur les mouvements de femmes palestiniennes ?

Le mouvement des femmes palestiniennes a été précurseur dans la région, notamment sur la lutte pour les droits des femmes, et ce, dès la fin du 19ème siècle. Au sein de ce mouvement, il y a eu en permanence un parallèle entre la lutte pour les droits des femmes et la lutte pour l’autodétermination du peuple palestinien. Et, ça, par rapport à d’autres mouvements de femmes, c’est vraiment une spécificité des femmes palestiniennes. Même s’il y a des différences de statuts - du fait d'être en Cisjordanie, à Jérusalem-Est, à Gaza, dans les camps de réfugiés ou en exil - les revendications sont sur ces deux champs et l’ont toujours été. On ne peut pas avoir la grille d’analyse des droits des femmes comme on l’a ailleurs sur la question des violences faites aux femmes, parce que la première source de violences faites aux femmes, c’est celle de la colonisation et de l’occupation militaire israélienne. Et c’est intimement lié, forcément, parce que cette occupation a des conséquences sur le reste. Donc c’est impossible de séparer féminisme et lutte nationale pour les Palestiniennes, ce serait fausser le regard. Ca a d’ailleurs été un problème dans les mouvements féministes, notamment européens, parce qu’on s’y est intéressées, par exemple, aux femmes afghanes, aux femmes au Pakistan, au Maroc, en Ukraine… Mais, on n’a que peu parlé des Palestiniennes parce qu’on a l’impression qu’elles ne sont pas dans des combats féministes, alors qu’elles le sont, mais ce sont des combats toujours liés à la politique de colonisation.

Peux-tu nous dire comment ces femmes palestiniennes luttent concrètement contre l’occupation et la colonisation ?

Historiquement, les femmes se sont organisées dès le début du 20ème siècle, elles ont créé des partis et associations féministes et féminines qui avaient leurs propres revendications. Elles manifestaient déjà au moment du mandat britannique, quand le projet sioniste7 a commencé à se faire connaître - parce que les Palestiniens en ont entendu parler très tôt, directement après le premier Congrès Sioniste qui a eu lieu à Bâle en 1897. Et donc les femmes faisaient des manifestations en Palestine, elles remettaient des lettres officielles au nom de leurs associations aux différents consuls... Ce système va perdurer jusqu’à aujourd’hui avec des associations féminines qui existent encore et qui ont toujours ces doubles revendications. Aujourd’hui, ces associations permettent une solidarité pour beaucoup de femmes qui se retrouvent seules à gérer la famille quand le mari est en prison pendant des années, voire quand il meurt - ce qui est quand même fréquemment le cas.

En parallèle de ces associations, dans les pays du Moyen Orient, il y a un principe de solidarité familiale et les individus sont soutenus et soutiennent les femmes dans ces cas-là également. Il y a une solidarité de proximité, et c’est une manière de lutter contre la colonisation. On retrouve aussi cette solidarité dans le soutien envers les prisonniers, parmi lesquels il y a beaucoup d’enfants. En fait, il y a plein de petites luttes quotidiennes : pour permettre aux enfants d’accéder à l’école, gérer leurs traumatismes, mais aussi passer à travers les checkpoints, avoir accès aux soins de santé, à l’accouchement… Parce que les femmes sont parfois contraintes d’accoucher à côté des checkpoints et que, même en Cisjordanie, Israël démolit les centres de santé. Tout ce système de colonisation a des conséquences sur la santé des femmes, elles font beaucoup de fausses couches. Et, de manière générale, il y a beaucoup de personnes blessées, amputées. Au-delà des morts, il y a toutes ces vies brisées et ces personnes qui ont besoin de soin. donc il y a toute cette question de l’accès aux soins et de manière plus générale de l’accès à la vie… Et tout ça, ça fait partie de la lutte contre la colonisation.

Concernant les femmes dans la diaspora, il y en a qui ont la possibilité d’intervenir. En ce qui me concerne, ça va être sur le champ de l’histoire, mais pour d’autres ça sera la sociologie, d’autres le feront par le biais de l’art : la chanson, la peinture... Tout ça c’est aussi des manières de parler de cette colonisation, d’alerter l’opinion publique et de rappeler l’injustice qui est faite aux Palestiniens.

Donc il y a toutes ces manières de lutter, qu’on soit en Palestine ou en exil. La lutte palestinienne est extrêmement large et, en même temps, va dans des petits détails, dans de multiples aspects du quotidien.

Quelques mouvements pour les droits des femmes

Mentionnons les associations Al Haq, Bisan et The Palestinian Working Woman Society for Development qui luttent quotidiennement pour les droits des femmes et contre la colonisation en Palestine.

Ajoutons également que, depuis 2019, nous avons assisté à l’émergence du mouvement des femmes “Tali’at” (“qui se lèvent”) partout où il y a une présence palestinienne. Ce mouvement s’est constitué suite au féminicide d’Israa Gharib, tuée par ses frères. Ce mouvement se concentre principalement sur les féminicides et les violences familiales, mais dénonce, de manière générale, la domination patriarcale ainsi que la colonisation israélienne, que les femmes palestiniennes considèrent comme toutes deux responsables des violences faites aux femmes8.

Étant donné que l’existence palestinienne est menacée, il y a également une partie de la résistance qui vise à transmettre la mémoire, les pratiques palestiniennes… Comment les femmes continuent-elles à faire vivre celles-ci ?

Alors ce sont les femmes et les hommes qui font ça, là-dessus je ne ferais pas de séparation. C’est vraiment l’ADN des Palestiniens et des Palestiniennes, cette transmission. Que ce soit la transmission de l’histoire, la transmission de la culture, bien évidemment de la cuisine qui fait partie de la culture… Et cette transmission met d’ailleurs en échec le projet israélien qui pensait qu’une fois les Palestiniens chassés hors de Palestine, ils finiraient par se dissoudre dans les pays dans lesquels ils se sont réfugiés. En réalité, il n’en a jamais été, et ce, pour différentes raisons. D’abord pour une raison éminemment politique qui est que les Palestiniens ont continué à résister dans les camps de réfugiés pour continuer la lutte pour la libération nationale, et les femmes en ont fait partie9. Et ensuite parce que, contrairement à ce que peut laisser penser une vision coloniale qui imagine que tous les Arabes sont interchangeables, un Libanais ce n’est pas un Syrien, ce n’est pas un Palestinien, ce n’est pas un Irakien. Même si on parle une langue commune, on a des accents différents, on a des traditions qui peuvent varier. C’est sûr qu’on a un fond commun, mais c’est comme les Canadiens, les Français et les Belges : ils parlent la même langue, mais c’est complètement différent. C’est exactement la même chose pour le monde arabe.

Et donc aujourd’hui, on constate quoi ? Que même dans l’exil, les Palestiniennes gardent cette identité et revendiquent leur palestinianité. Même s’il y a eu des moments où elles ont dû s'empêcher de dire qu’elles étaient Palestiniennes pour des raisons de sécurité, elles ont toujours continué à l’intérieur du foyer à avoir cette culture en permanence. Même dans l’accent en fait, moi je ne suis pas née en Palestine, je suis réfugiée, mais j’ai l’accent palestinien. Et quand je vais en Palestine et que je parle, je suis reconnue comme Palestinienne.

Pour toi la lutte palestinienne est donc aussi une lutte féministe ?

Oui et pour les femmes palestiniennes, les deux sont toujours associées. Parce que, bien évidemment, elles dénoncent quand il y a une pression masculine trop forte, elles luttent pour l’égalité hommes/femmes. Il faut savoir que suite à leurs revendications, des statistiques sur les violences faites aux femmes en Palestine ont été mises en place. Et comme je l’ai dit, les Palestiniennes sont souvent avant-gardistes, par exemple, la première section sur l'étude du genre a ouvert en 199410 à l’université de Beir Zeit à Ramallah, avant le Liban, etc. Il y a aussi eu une lutte parce que dans les pays arabos-musulmans, en général, c’est le père qui donne la nationalité et la religion. Bref ça a été une de nos luttes de demander pour qu’on puisse nous, les femmes, donner la nationalité. Parce que l’exil a fait qu’il y a beaucoup de mariages mixtes et on voulait pouvoir continuer à donner à nos enfants cette nationalité, même si on n’a pas de passeport11. Il y avait cette volonté et ça devait aboutir, mais le problème c’est qu’on n’est pas un état indépendant. On ne peut pas faire de construction, on est tout le temps freinées parce qu’à cause de l’occupation on ne peut pas mettre en place de véritables outils étatiques et de véritables outils de société. Mais c’est un agenda qui n’est pas oublié, les ONG féministes palestiniennes l’ont toujours en tête.

Mais voilà, on en revient toujours à ça. On ne peut pas parler de féminisme et de luttes féministes si on ne parle pas de la libération du peuple dans sa totalité. Le mot paix, c’est un mot qui est dit à tout bout de champ par les Occidentaux, sans sens. Il faut comprendre qu’il ne peut pas y avoir de paix sans libération. Le premier mot qui devrait être sur la bouche de tout le monde, ça devrait être “libération”. Ce n’est que quand il y aura la libération qu’on pourra parler de paix, d’égalité et de féminisme.

 

Nous avons également interviewé Mehdi, responsable de la section Palestine d’Intal, qui est un “mouvement de solidarité internationale qui défend la paix et le développement souverain” particulièrement actif dans l’organisation des actions de soutien à la Palestine. Mehdi ajoute à ces constats :

“La place, très forte, des femmes dans le mouvement a été mise à mal par le régime d’apartheid israélien, parce qu’ils sentaient le danger de cette unité dans la lutte. Israël a essayé de mettre des entraves. Par exemple, je suis parti en Palestine en 2015 et on a rencontré Al Haq qui est une organisation qui lutte pour les droits humains : à chaque fois qu’ils ouvraient un bureau, très peu de temps après, Israël faisait tout pour le fermer. Et aussi, c’est sûr que, dans ce genre de situation, les femmes sont encore plus touchées. Concrètement, une femme qui perd les hommes de sa famille, elle va rencontrer des difficultés pour avoir un revenu. Et par ailleurs, les Palestiniens sont forts dépendants du marché du travail en Israël et beaucoup travaillent en Israël. Mais avec tous les checkpoints dans lesquels il y a les files, ça rallonge énormément le temps de ces journées de travail. Et pendant ce temps-là, c’est beaucoup les femmes qui sont responsables des enfants et pour elles aussi le temps d’attente est super long. Et ça limite également la possibilité, pour les hommes, d’avoir une tâche ménagère en dehors de leur boulot. Aussi, beaucoup d’hommes sont emprisonnés12 et donc la charge de travail, la charge sociétale qui repose sur les femmes est renforcée, ça emprisonne également leurs droits fondamentaux. C’est clair que les discriminations sexistes qui existent dans toutes nos sociétés sont renforcées par l’apartheid israélien.

Donc, on le voit à tous les niveaux, le fait qu'Israël mette des checkpoints, empêche les gens de circuler librement, empêche les personnes d’avoir une assistance médicale, des soins de santé accessibles, des droits sociaux garantis… tout ça, c’est deux fois plus discriminant pour les femmes.c’est d’ailleurs pour ça qu’elles prennent un rôle de premier plan dans les luttes de libération pour les Palestiniens et qu’elles organisent des manifestations et tout, malgré le risque d’emprisonnement, et les difficultés de s’organiser dans cette situation.”

C’est en effet difficile de revendiquer des droits quand on est dans une situation de colonisation avec un état qui n’en est pas vraiment un et qui est constamment menacé. Malgré cela, il y a des choses concrètes qui sont mises en place…

Oui, en Palestine - enfin en Cisjordanie, parce qu'à Gaza tout a été détruit - il y a des associations de lutte contre les violences qui existent et qui luttent pour mettre en place des observatoires pour analyser ces violences. D’ailleurs dans le podcast “Les couilles sur la table”, Victoire Tuaillon avait interrogé une écrivaine qui avait travaillé sur les féminicides et qui avait bien analysé, avec des femmes palestiniennes, le lien entre féminicides et emprisonnement, occupation, détention, violences coloniales13. Mais ces violences ne sont pas acceptées par les femmes et il y a des associations qui interviennent auprès des familles, et aussi dans le champ de l’éducation. Il y a cette volonté de travailler sur l’éducation des jeunes enfants.

Féminicide et colonisation : entre politique d’exclusion et culture de contrôle des Palestiniens en Israël (Nadera Shalhoub-Kervorkian & Suhad Daher-Nashif) dans “Féminicides : une histoire mondiale” - l’article auquel Sandrine Mansour fait référence

Dans cet article, les autrices nous démontrent que, de la même manière que nous ne pouvons pas considérer un féminicide comme étant un “crime passionnel”, nous ne pouvons comprendre les meurtres de femmes et de filles en Palestine si nous les analysons sous le seul prisme du “crime d’honneur”. En effet, cette vision est culturaliste (et raciste), au sens où elle réduit ces crimes à une spécificité culturelle qui serait propre au monde arabo-musulman
14. Or, les féminicides ont lieu dans le monde entier et dans tous les milieux sociaux. Pour comprendre les spécificités des féminicides dans le contexte de colonisation israélo-palestinien, nous ne pouvons nous contenter d’une analyse “culturo-confessionnelle” réductrice et simpliste : il nous faut au contraire chercher des explications politiques et historiques.

Dans cette idée, les autrices nous invitent à inscrire les féminicides perpétrés dans la communauté palestinienne d'Israël sur laquelle elles se sont penchées, dans les deux systèmes principaux au sein desquels ils prennent place.

Premièrement,la société palestinienne fait face, dans le cadre de la colonisation, à une politique d’exclusion au niveau national. Cette politique d’exclusion désigne la manière dont Israël nie les droits du peuple palestinien “à la sécurité, au logement, à la liberté de mouvement, aux droits politiques, au développement économique, à l’éducation et à la santé, parmi bien d’autres encore”. Et deuxièmement, localement, nous assistons à une culture de contrôle qui désigne “les manifestations locales des logiques patriarcale et masculine”, elles-mêmes “favorisées par la politique d’exclusion”. En effet, sous contrôle d’un “pouvoir externe”, une possible réaction est de retourner le contrôle contre soi-même. De la sorte, le contrôle accru des membres de la communauté qui ont le moins de pouvoir (en l'occurrence, dans notre situation et dans un contexte patriarcal, les femmes et les filles) par les hommes palestiniens peut être considéré comme une manière pour ceux-ci de (tenter de) réaffirmer leur pouvoir. “Dans cette perspective, le corps des femmes devient un lieu de lutte pour le contrôle interne” (Taraud : 2022).

Ce qui ne signifie pas que des hommes tuent des femmes en Palestine seulement à cause de la colonisation, mais que celle-ci joue un rôle central dans la construction du social et que ces meurtres ne peuvent être compris qu’en tenant compte d’un tel contexte. La société palestinienne est bien une société patriarcale, comme la société belge, et, de façon très concrète, les violences envers les femmes s’intensifient lorsque le contexte est marqué par les violences, l’instabilité, l’exclusion et qu’il n’y a pas de place pour la sensibilisation, la responsabilisation des auteurs et qu’il manque d’infrastructures, etc.

Bref, la politique coloniale, réaffirmée et durcie ces deux dernières décennies, tout comme la logique patriarcale, renforcent, voire justifient, les féminicides, tant chez les colonisés que chez les colonisateurs. La première nourrissant la seconde, elles s’inscrivent au croisement de plusieurs systèmes - israéliens et palestiniens, sociaux et légaux, formels et informels. “Ces structures informelles parmi lesquelles le système de parenté, le patriarcat et l’organisation tribale traditionnelle, continuent de jouer un rôle important dans la définition des frontières physiques et sociales à l’intérieur desquelles les individus, femmes et hommes, peuvent se mouvoir et agir.” Le cadre colonial renforce ces systèmes informels auxquels les Palestiniens se rattachent dans un rejet de la colonisation.

En résulte que les femmes, dans un tel contexte colonial-patriarcal, ont peu de possibilités de faire appel à l’aide lorsqu’elles sont confrontées à des violences. Elles éprouvent notamment des difficultés et une méfiance légitime lorsqu’il s’agit de porter plainte (que ce soit en Israël auprès du système israélien qui culturalise et n’agit pas efficacement contre les violences15 ou dans les colonies où la police et la justice n’ont pas forcément les moyens de s’attaquer à celles-ci16). Inscrits dans ce système colonial, les différents systèmes qui pourraient leur venir en aide se révèlent inutiles et renforcent cette violence exercée sur les femmes.

Y a-t-il d’autres difficultés découlant de cette situation d’occupation ?

Oui, il faut savoir que la Palestine était différente d’aujourd’hui ne serait-ce qu’il y a quinze ans. Parce qu’ il y a un autre phénomène qu’on observe au Moyen Orient qui est, ce que j’appelle, la wahhabisation17 des esprits qui découle de l’influence de l’Arabie Saoudite dans la région. Par exemple, les voiles et les hijab qu’on voit aujourd’hui en Palestine n’existaient pas avant. Il y avait des femmes voilées bien sur, mais les Saoudiens ont amené une vision de l’islam qui n’était pas celle qu’on retrouvait en Palestine. Et à cause de ça, il y a un peu un enfermement de la condition des femmes, même s’il y a aussi des femmes qui luttent contre ça.

Mais donc, une des conséquences de la colonisation, c’est la dépendance de l'économie palestinienne aux économies extérieures, car on est dans un système économique dépendant de l’occupant, puisque la monnaie en Palestine c’est la monnaie israélienne, le Shekel18. Et donc ça complique l’autonomie économique des Palestiniens et notamment des femmes, qui doivent se tourner vers d’autres financements. Et donc voilà, ça permet à un pays comme l'Arabie Saoudite, dont les Palestiniens ont besoin, d’influer sur la situation. Et donc la lutte consiste aussi à se battre pour ramener une culture qui est celle des Palestiniens et des Palestiniennes, et pas celle de l'Arabie Saoudite.

On utilise souvent le terme d’intersectionnalité pour parler des femmes qui se retrouvent à l’intersection de plusieurs systèmes d’oppression et on voit que dans le cas des Palestiniennes, comme tu le dis, il y a l’occupant, mais aussi des puissances extérieures dont tu deviens dépendant, un quotidien extrêmement complexe, mais aussi le sexisme des hommes palestiniens. Ce terme d’intersectionnalité m’amène à cette question : que penses-tu de l’implication (ou du manque d’implication ) des féministes européennes pour dénoncer la situation actuellement en cours ?

Aujourd’hui le comble de tout cela, c’est à Gaza où la situation s’est dégradée d’une manière absolument indicible… On n’a même plus de mots pour décrire la situation. Et c’est intéressant de voir que les mouvements féministes européens, on ne les entend pas sur les conditions des femmes actuellement à Gaza. Et je ne parle même pas de mentionner la question politique, mais de ne serait-ce que dénoncer ce qu’il s’y passe à un niveau humain… Et on n’entend rien, il n’y a pas eu d’appel pour une manifestation pour les femmes en Palestine. On voit bien qu’il y a un problème dans le mouvement féministe.

Je pense que c’est en partie à cause de l’islamophobie qui est présente dans les mouvements féministes, comme Françoise Verges l’a très bien démontré. Il y a une espèce de racisme sous-jacent par rapport à l’islam. Alors qu’en plus, moi je suis chrétienne palestinienne et j’ai de la famille à Gaza. Et je le dis, non pas parce que je serais ou ne serais pas croyante, mais je le dis pour que les gens se rendent compte de la monstruosité de leur point de vue qui occulte la réalité de la multiplicité de cette population palestinienne et réduit ça à un problème de religion19. Et il y a un “deux poids-deux mesures” insupportable qui fait que certaines ne soutiennent pas des femmes musulmanes. Et donc on voit les limites de ces mouvements féministes qui sont aussi tombés dans les griffes du patriarcat dans leur lecture de la question palestinienne.

Tu peux développer un peu plus ce que tu veux dire par une lecture patriarcale de la question ?

Si on prend une vision globale, la majorité des grandes puissances européennes ont une position quand même très pro-israélienne et il y a un suivi, un financement, un armement du génocide20 qui est en cours. Et tout ça, les militantes européennes ne le questionnent pas. Alors que les premières victimes sont des femmes et des enfants. Les féministes devraient être aux avant postes pour crier, dénoncer ça, et elles ne le font pas. Elles reproduisent le schéma patriarcal de ces grandes puissances dont le seul intérêt c'est l’économie et où l’humain n’existe pas. Ces féministes prennent part indirectement en ne dénonçant pas ce qu’il se passe. Et ça me met très en colère. Mais je le savais déjà, c’était présent, j’avais déjà des témoignages de féministes qui me racontent comment, dans certaines sections de grosses associations féministes, il y a une condescendance par rapport à une femme qui arrive voilée …

C’est marquant notamment pour la question des règles. Ça a quand même été un grand sujet en Europe de lutter contre la précarité menstruelle. A Gaza, elles prennent des bouts de tente, des bouts de plastique21… Et Israël a bloqué les camions qui contenaient les protections périodiques. Et ça non plus je n’ai rien entendu là-dessus, même sur des choses aussi simples… Il y a vraiment un travail d’éducation à faire pour que les femmes qui luttent pour les droits des femmes comprennent qu’elles ont été piégées par un manque de regard critique et, de ce fait, un manque de regard juste.

Quelques mots pour conclure ?

Pour moi l’important c’est de comprendre qu’il n’y a pas de séparation à faire : la lutte féministe et la lutte pour la libération nationale vont de front. Après c’est sûr qu’en fonction de la sphère où tu es, de l'événement dans lequel tu es, tu interviens par rapport au sujet qui est posé. Mais il est évident qu’on porte les deux en permanence, on n’est pas découpées par rapport à ça.donc on parle de la situation des femmes, mais aussi de la situation de toute la population. Ce serait un danger de ne parler que des femmes et des enfants, comme si les hommes étaient coupables actuellement à Gaza. Alors que les hommes sont aussi victimes, les morts d’hommes sont aussi dramatiques, ils perdent aussi leur famille, on les voit aussi s’écrouler, perdre des membres, de la même manière. Donc là il faut qu’on soit dans l’inclusion, il ne faut pas qu’on soit dans un féminisme de bas étage, c’est vraiment tout un peuple qui est menacé. Et c’est sûr que c’est important de parler des femmes, comme les associations féministes palestiniennes le font, mais c’est un levier parmi d’autres à propos d’une cause qui concerne tout un peuple d’hommes, de femmes, d’enfants, et ce, quelque soit leur âge, leur religion et leur lieu d’habitation.

Et j’aimerais rajouter une dernière chose que je dis souvent “si vous acceptez ce qu’il se passe en Palestine, c’est-à-dire le non respect du droit international, c’est qu’un jour ça arrivera dans votre pays”.

 

Que peut-on faire depuis la Belgique ?

Cette interview nous démontre en quoi la lutte pour la libération de la Palestine doit nous interpeller, nous questionner et nous concerner, en tant que féministes européennes. Comme nous l’écrivions dans une analyse précédente22, nous sommes face à un capitalisme patriarcal transnational et notre riposte doit prendre en compte cette réalité. Pour organiser celle-ci, il est plus qu’urgent de décentrer notre regard pour être en mesure d’apprendre d’autres féminismes. Comme nous l’avons vu, les mouvements sociaux naissent dans des contextes socio-économiques spécifiques et sont façonnés par ces contextes. Si nous voulons mettre en pratique l’intersectionnalité dont nous parlons tant et faire un geste décolonial, nous devons regarder ce qui se pratique ailleurs, comme nous le suggère Mara Montanaro, autrice du livre Théories féministes voyageuses. Il est temps de dépasser les réticences que dénoncent Sandrine Mansour chez certaines féministes afin de s’inscrire dans un combat global contre les injustices et pour l’égalité, un combat qui implique la critique radicale des dynamiques coloniales et postcoloniales qui oppriment aujourd’hui le peuple palestinien ainsi que d’autres populations. Pour cela, depuis notre position en Belgique, il nous faut soutenir les luttes pour l’autodétermination de toutes les femmes et des peuples opprimés.

A ce propos, Mehdi nous a suggéré quelques moyens d’action afin de dénoncer la responsabilité qu’ont les pays européens dans les violences commises envers le peuple palestinien :

“La lutte à mener en Belgique vise à mettre toute la pression possible et envisageable sur l'État belge pour qu'il prenne des dispositions et qu’il coupe les relations militaires, diplomatiques, politiques et culturelles avec Israël”. Pour cela, Mehdi nous invite à suivre la campagne BDS lancée en 2005 par la société civile palestinienne, qui vise à “boycotter les produits israéliens, mais aussi de pratiquer un boycott sportif, culturel et académique23” ainsi que de faire pression sur des entreprises pour qu’elles arrêtent leur partenariat avec Israël. Cette méthode a été utilisée de nombreuses fois dans les luttes antiracistes (boycott des bus par les populations noires aux États-Unis, boycott de l’Afrique du Sud lorsque c’était un état d’apartheid). Plus récemment, le BDS a connu de petites victoires comme l’abandon du sponsoring de l’équipe de foot israélienne de la part de la marque Puma.

A cela, Mehdi ajoute : “Nous, en Belgique, on doit prendre cette responsabilité, ce qui veut dire organiser de grandes manifestations avec la coalition la plus large possible, avec les syndicats, les associations, la société civile, avec les partis politiques belges… Nous devons aussi interpeller ces partis pour qu’ils prennent des positions fortes. Il nous faut organiser le boycott comme le font BDS Bruxelles, l’ABP, Intal en ciblant certaines marques comme Carrefour, Axa… Nous pouvons pousser les entreprises belges à désinvestir d'Israël. C’est essentiel de soutenir tous les appels de boycott, de faire des motions citoyennes pour couper les partenariats, de demander un embargo militaire, de mettre la pression sur le monde culturel pour ne pas faire certains partenariats, pour pointer qu’Israël participe à l’Eurovision, pareil au niveau des instances sportives car Israël participe à l’Euro de foot cet été. Nous, on veut créer ces boycotts pour isoler Israël le plus possible, ce qui est absolument urgent pour la survie du peuple palestinien.

On veut que la Belgique prenne ses responsabilités et dise qu’on ne peut plus avoir des liens avec un état qui met en péril la vie d’une population entière et qui ne permet pas aux Palestiniens d’espérer un avenir ou même à une sorte d'échappatoire. Et ça je pense que c’est vraiment le combat fondamental qu’on doit mener et, comme je le disais, où des femmes palestiniennes sont à l’avant garde. Il faut donner plus de voix et plus d’écoute à ça. Et donc si on se bat contre les injustices sexistes ici en Belgique, on doit se battre pour la liberté du peuple palestinien, parce que si on tolère cette situation d’apartheid, si on tolère ces actes… C’est qu’il y a un problème dans la définition des droits humains qu’on se fait et, ça, on ne peut plus l’accepter. Et notre rôle, en Belgique, est très modéré : on ne peut pas dire pour les Palestiniens ce qu’ils devraient faire ou devenir, mais on peut se déclarer solidaires, défendre l’autodétermination du peuple palestinien, dénoncer la Belgique qui a des partenariats avec un état qui commet des crimes d’apartheid, fait des vols de terre, fait des crimes de guerre, spolie tout un peuple depuis 75 ans… Et ça je pense que c’est le meilleur combat qu’on puisse mener ici.”

 

Pour aller plus loin

Non cités dans l’analyse
Écrits de Sandrine Mansour
"L'histoire occultée des Palestiniens: 1947-1953", Éditions Privat, Toulouse, 2013
"Je suis Razan" de Chantal Monteiller, préface de Sandrine Mansour, Les Éditions Arcane 17, Paris, 2021.
"La naissance des mouvements de femmes au Levant", in "Féminisme dans les Pays arabes", Revue Nouvelles Questions Féministes NQF, Antipodes, Vol.35, n°2, 2016.
"La diaspora palestinienne au féminin", Revue Diasporas, Histoire et sociétés, Édition Universités du Mirail, N°11.

Articles académiques
Caron, R., Damant, D., & Flynn, C. (2017). Des récits de réfugiées palestiniennes à travers la grille de l’intersectionnalité. Recherches féministes, 30(1), 183-199.
Latte Abdallah, S. (2013). Des féminités mobilisées et incarcérées en Palestine. Critique internationale, (3), 53-69.
Marteu**, É. (2012). Féminismes israéliens et palestiniens: questions postcoloniales. Revue Tiers Monde, (1), 71-88.
Pirinoli, C. (2007). Genre, militantisme et citoyenneté en Palestine 1. Nouvelles questions féministes, 26(2), 73-91.

Livres
Marcos, N. (2013). Le désespoir voilé : femmes et féministes de Palestine. Riveneuve éditions.
Abdo, N. (2019). La révolution captive ; la lutte anticoloniale des femmes palestiniennes dans le système carcéral israélien. Blast.

Autres
“L’histoire inachevée du féminisme palestinien” Cecilia Dalla Negra dans Orient VVI (2021) :
https://orientxxi.info/magazine/articles-en-italien/l-histoire-inachevee-du-feminisme-palestinien,4590

Cités dans l’analyse
Rapports Amnesty International
Amnesty Internationl “L’apartheid israélien envers le peuple palestinien : un crime contre l’humanité” - vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=Ev2jc-Mjuq0
Amnesty International “Israël et Territoires palestiniens occupés : tout ce qu'il faut savoir sur les droits humains” : https://www.amnesty.fr/pays/israel-et-territoires-occuppes
Amnesty International “Israël : les Palestinien-nes sont victimes d’un apartheid” :
https://www.amnesty.fr/discriminations/actualites/israel-les-palestiniens-sont-victimes-dun-apartheid

Productions issues de l’associatif
Camarade Magazine “Il n’y aura pas de lutte des classes sans décolonisation” : https://camarade.be/il-ny-aura-pas-de-lutte-des-classes-sans-decolonisation/
Anne-Sophie Tirmarche,
"Sensibiliser aux violences faites aux femmes... sans renforcer des stéréotypes racistes ?" , Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE asbl), septembre 2022. :
https://www.cvfe.be/publications/analyses/431-sensibiliser-aux-violences-faites-aux-femmes-sans-renforcer-des-stereotypes-racistes
Cindy Pahaut, “Décoloniser les corps et les territoires : vers une révolution féministe”, Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE asbl), juin 2022 :
https://www.cvfe.be/publications/analyses/419-decoloniser-les-corps-et-les-territoires-vers-une-revolution-feministe
Outil pédagogique de l’association Arab Women’s Solidarity Association “Femmes de Palestine, féminisme au quotidien” : 
https://awsa.be/uploads/OP_femmespalestine_AWSA.pdf

Podcasts
Podcast Jins “Libérer la Palestine” avec Rima Mobarak :
https://www.listennotes.com/podcasts/jins/lib%C3%A9rer-la-palestine-avec-9EGqLFd6rUl/
Podcast “Tuer les femmes : une histoire mondiale” où est interviewée Christelle Taraud, auteure de “Féminicides : une histoire mondiale” :
https://www.binge.audio/podcast/les-couilles-sur-la-table/tuer-les-femmes-une-histoire-mondiale-2-2

Productions académiques
Dhoquois-Cohen, R. (2005). Les femmes palestiniennes face au conflit, à l’occupation et au patriarcat. Confluences Méditerranée, (4), 67-76.
Taraud, C. (2022). Féminicides. Une histoire mondiale. La Découverte.
Montanaro, M. (2023). Théories féministes voyageuses. Internationalisme et coalitions depuis les luttes latino-américaines. Les Editions de la rue Dorion.

Quelques sites et organisations
Plateforme Palestine : https://plateforme-palestine.org
Mouvement BDS : https://bdsmovement.net/
Association belgo-palestinienne : https://www.association-belgo-palestinienne.be/
Intal : https://www.intal.be/
Institute of Women’s studies : http://iws.birzeit.edu/
Al Haq : https://www.alhaq.org/
Bisan : https://www.bisan.org/
The Palestinian Working Woman Society for Development : https://pwwsd.org/

 

1 Le Larousse définit le Levant comme le “nom donné jusqu'aux années 1920 au littoral oriental de la Méditerranée, sous domination musulmane, particulièrement à la Palestine, au Liban, à la Syrie et à l'Asie Mineure.”

2 S’iels ont la citoyenneté, les Palestinien-ne-s en Israël ne pourront cependant jamais obtenir la nationalité. Iels n’ont donc pas les mêmes droits, accès que les Israélien-ne-s et sont en quelque sorte des citoyen-ne-s de seconde zone.

3 “Il y aurait 14,3 millions de Palestiniens dans le monde : 3,2 M en Cisjordanie, 2,2 M à Gaza, 1,7 M en Israël, 6,4 M dans les pays arabes (une grande proportion de réfugiés), et 761 000 dans d’autres pays étrangers” (Chiffres de https://www.tresor.economie.gouv.fr/Pays/PS/presentation-generale)

4 Nous pouvons définir le colonialisme comme “l’assujettissement d’un peuple par un autre. Le colonialisme est ainsi une relation de pouvoir inégale, çàd une forme de domination et de contrôle (politique) d’un territoire et d’une population par un état. La coercition exercée par le colonisateur est généralement justifiée par une forme d’idéologie qui assoit sa supériorité sur la population colonisée” (Taraud : 2022)

5 “En droit international, le seuil pour définir un crime d’apartheid est atteint lorsque trois critères principaux sont réunis :
- un système institutionnalisé d’oppression et de domination d’un groupe racial par un autre ;
- un ou des actes inhumains, tels que transferts forcés de populations, tortures et meurtres, commis dans le cadre de ce système institutionnalisé ;
- une intention de maintenir la domination d’un groupe racial sur un autre.” (“Israël : les Palestinien-nes sont victimes d’un apartheid” d’Amnesty International)

6 “50 kilomètres, 5 heures de route” Le Monde Diplomatique : https://www.monde-diplomatique.fr/cartes/palestine-routes

7 Le Robert définit le sionisme comme un “mouvement politique et religieux, visant à l'établissement puis à la consolidation d'un État juif en Palestine”.

8 Voir “Femmes de Palestine, féminisme au quotidien” de AWSA

9 A ce sujet, nous conseillons le podcast “Libérer la Palestine” de Jins dans lequel Rima Mobarak parle de cette lutte dans les camps de réfugié-e-s où l’identité palestinienne se maintient à travers la reproduction de pratiques (par exemple, des manières spécifiques de broder, des dialectes…), de la diffusion de la mémoire, mais également à travers l’espoir du “droit au retour” auquel s’accrochent ces différentes générations de Palestinien-ne-s.

10 Il s’agit de l’Institute of Women’s studies : http://iws.birzeit.edu/. Mentionnons notamment leur étude “Formations of Masculinities and Gender - Dynamics in the Palestinian Colonial Context”

11 Etant donné la situation d’apartheid, la question des papiers est extrêmement compliquée. Pour commencer, beaucoup de Palestinien-ne-s sont considérés comme apatrides.Ensuite, pour celles et ceux qui ont des papiers, il existe 4 types de cartes d’identité qui octroient différents droits et accès. En ce qui concerne la nationalité palestinienne, celle-ci est constamment remise en question par Israël, plus d’informations : https://www.chroniquepalestine.com/la-question-de-la-nationalite-palestinienne/. En ce qui concerne le passeport, il existe un passeport palestinien, mais que tou-te-s ne détiennent pas et qui ne donne accès qu’à 35 destinations sans visa : https://visaindex.com/fr/country/classement-passeport-territoires-palestiniens/.

12 On estime que 40% des hommes palestiniens sont passés par la prison depuis 1947. Actuellement, un peu moins de 7000 palestinien-ne-s sont emprisonné-e-s, dont des enfants qui, dès 12 ans, peuvent être incarcéré-e-s. L’emprisonnement est un des piliers du système colonial tant il est massif et utilisé comme une arme politique. Plus d’informations : https://plateforme-palestine.org/Prisonniers-les-chiffres-cles-2023.

13 “Tuer les femmes : une histoire mondiale” où est interviewée Christelle Taraud, auteure de “Féminicides : une histoire mondiale”

14 A ce sujet, voir notre analyse “Sensibiliser aux violences faites aux femmes… sans renforcer les stéréotypes racistes” qui dénonce cette tendance à supposer que “les hommes racisés seraient foncièrement plus sexistes et violents envers les femmes que les hommes blancs occidentaux”. L’autrice nous mentionne à propos de la vision culturaliste des violences faites aux femmes “Évitons l’écueil du traitement différencié, a fortiori dans un contexte où le racisme biologique a cédé la place à un racisme de type culturel. En l’occurrence : cessons d’attribuer à « leur culture » les violences des hommes racisés, et à une pathologie mentale celles commises par des hommes blancs. [...] Comme le résume la sociologue Sherene Razack : « Quand des hommes blancs tirent sur leurs femmes et leurs enfants et mettent le feu à la maison, personne ne considère que c’est une pratique typique de la culture blanche »[19]. [...] si la violence peut parfois, selon les contextes culturels, prendre des formes différentes, c’est bien le patriarcat qui en reste la cause”.

15 A titre d’exemple, Amnesty International notait “Entre janvier 2020 et août 2022, 69 femmes ont été tuées. Les 29 féminicides de femmes juives israéliennes ont tous été élucidés tandis que 58 % des 40 féminicides commis sur des Palestiniennes en Israël pendant la même période ne l’ont pas été.” https://www.amnesty.org/fr/location/middle-east-and-north-africa/israel-and-occupied-palestinian-territories/report-israel-and-occupied-palestinian-territories/

16 A ce sujet, voir l’article de Dhoquois-Cohen “Les femmes palestiniennes face au conflit, à l’occupation et au patriarcat”

17 Le wahhabisme est une doctrine religieuse sunnite qui défend une interprétation littérale du Coran. Mehdi qualifie ce courant “d'extrême droite religieuse” et nous suggère que celui-ci affecte la place des femmes au sein de la société palestinienne, mais également dans les luttes où les femmes avaient pourtant une place centrale.

18 Une grande partie de la population palestinienne vit en situation de pauvreté. Notons que si elle est dépendante de l’économie israélienne, elle l’est également de son marché du travail. Plus d’informations : https://camarade.be/il-ny-aura-pas-de-lutte-des-classes-sans-decolonisation/

19 Mehdi souligne également l’importance de ne pas réduire la situation à un “conflit religieux” et nous déclare “Je pense que nous devons défendre une vision qui est hors des clivages religieux, justement ne pas en faire une question ethnique. Nous soutenons la Palestine parce que c’est une injustice profonde et ça n’a rien à voir avec des questions religieuses”.

20 L’utilisation du terme de “génocide” est à utiliser avec prudence, néanmoins, de nombreuses associations telles que la FIDH alertent sur le sérieux risque de génocide actuellement à Gaza. Ce constat est également celui de la Cour Internationale de Justice qui, même si elle ne tranchera la question de si nous sommes face à un génocide que dans plusieurs années, a souligné la probabilité de celui-ci et a ordonné à Israel de tout faire pour prévenir celui-ci. Plus d’informations : https://www.courrierinternational.com/article/polemique-peut-on-parler-de-genocide-en-cours-a-gaza ; https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2024/01/israel-must-comply-with-key-icj-ruling-ordering-it-do-all-in-its-power-to-prevent-genocide-against-palestinians-in-gaza/ ; https://www.rtbf.be/article/israel-mene-un-genocide-contre-le-peuple-palestinien-estime-la-federation-internationale-pour-les-droits-humains-11299924

21 Pour plus d’informations sur les difficultés rencontrées par les Palestiniennes à Gaza à propos de leurs règles : https://www.rts.ch/info/monde/14598610-manque-dhygiene-et-penurie-de-protections-menstruelles-a-gaza-les-femmes-risquent-leur-sante.html

22 Cindy Pahaut, “Décoloniser les corps et les territoires : vers une révolution féministe”

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