Femmes et filles d’Afghanistan, nous ne nous tairons pas ! - Carte blanche
CARTE BLANCHE
Femmes et filles d’Afghanistan, nous ne nous tairons pas !
à destination des décideurs et décideuses politiques
Nous, associations féministes réunies sous la coupole Alter Egales1, nous, militantes féministes et des droits humains, nous, femmes, ne pouvons rester silencieuses face à ce qui se déroule en Afghanistan.
La situation à l’aéroport de Kaboul, aux alentours et dans l’ensemble du pays est d’une atrocité sans nom. Depuis quelques jours déjà, les femmes n’osent plus sortir de leur maison, elles ne peuvent plus se rendre au travail, prendre un bus, etc. De nombreuses disparitions, mariages forcés, viols, meurtres nous sont rapportés de sources sûres … Les avancées (relatives) constatées depuis 20 ans, en termes de liberté et de place dans la société des femmes afghanes, volent aujourd’hui en éclats. Cela nous est insoutenable !
Les témoignages que nous recueillons et émanant d’associations actives sur le terrain en contact direct avec des femmes afghanes nous font pousser un cri de détresse : IL EST IMPÉRATIF DE GARANTIR DES PROTECTIONS SUPPLÉMENTAIRES POUR LES FILLES ET LES FEMMES AFGHANES.
La situation humanitaire actuelle doit être assimilée à un état de guerre et ce, pour les femmes, mais également pour différentes minorités, notamment les opposant·es politiques, les défendeur·euses des droits humains, les personnes LGBTQI+, mais aussi pour les intellectuel·es, les étudiant·es, les artistes, les athlètes, etc.
Nous avons pris bonne note de la signature, par la Belgique ce 29.08.2021, de la déclaration internationale concernant l’évacuation du personnel étranger et des Afghans ayant travaillé pour les gouvernements étrangers2. Cette déclaration fait mention d’un accord avec les Talibans pour que ces personnes puissent quitter le pays en toute sécurité. Il s’agit d’un premier pas. Néanmoins, cet accord nécessite la bonne volonté des Talibans et le respect de leurs engagements… Ce dont nous sommes en droit de douter aujourd’hui.
Dans ces conditions, nous, associations féministes membres d’Alter Egales, demandons à nos représentant·es politiques fédéraux, européen·nes, à nos député·es, à nos mandataires de :
- Reprendre le plus tôt possible les ponts aériens pour permettre aux femmes afghanes qui veulent fuir le pays avec leur famille, un trajet migratoire dans les meilleures conditions de sécurité. En effet, il n’est plus à démontrer que les femmes et les filles migrantes, réfugiées et demandeuses d'asile sont particulièrement exposées à la violence, à l’exploitation et à des formes multiples et intersectionnelles de discriminations et de persécutions dans leur pays d'origine, au cours de leur voyage, en transit et/ou dans les pays de destination, d’autant plus qu’elles sont confrontées à des difficultés et des barrières structurelles pour surmonter cette violence et cette exploitation dans leurs différentes formes.
- Garantir à ces femmes un accueil DIGNE sur le sol belge, tout en assurant une approche inclusive et intersectionnelle qui tienne compte des différentes situations et caractéristiques personnelles des femmes et des filles afghanes arrivant ou déjà présentes sur le territoire belge.
- Garantir des moyens exceptionnels pour faire face à cette situation exceptionnelle, en assurant notamment de nouvelles places d’accueil dans nos centres d’accueil, des budgets supplémentaires et correspondant aux besoins, un soutien psychologique accessible et adéquat pour toute personne afghane le souhaitant.
- Informer dans les plus brefs délais les familles afghanes arrivées en Belgique ces dernières années sur les possibilités de rapatriement des membres de leur famille resté·es en Afghanistan.
- Garantir un statut de réfugié·es à tout·es les ressortissant·es afghan·es, ou à tout le moins, leur garantir une protection subsidiaire. De donner la possibilité aux associations actives en Belgique d’entamer les démarches administratives nécessaires pour rendre possible l’accès au territoire belge (demande de passeports, procédure d'asile, ..) au nom des personnes encore en Afghanistan afin d’en faciliter le processus.
- Tout mettre en oeuvre pour que les femmes afghanes et leurs familles restées sur place, par choix ou par obligation, ne subissent pas des violences des Talibans. Nous demandons aux Autorités belges et européennes de négocier avec les Talibans des ponts humanitaires et d’entraide pour que les ONG mais aussi les associations de défense des droits des femmes puissent poursuivre, voire intensifier, leurs actions sur place. Nous demandons également à l’Etat belge et aux instances européennes de financer une assistance spécifique et des programmes humanitaires de protection pour les femmes afghanes, victimes ou à risque de violence ainsi que de leurs proches qui les soutiennent
- Veiller à ce que les mesures prises durant la crise actuelle et durant tout l’état d'urgence qui s'ensuit soient conformes aux obligations internationales3 relatives aux droits humains des femmes et des filles migrantes, réfugiées et demandeuses d’asile. Nous rappelons en effet que plusieurs textes internationaux visent à protéger spécifiquement les filles et femmes en raison de leur vulnérabilité et besoins spécifiques. Ces textes reconnaissent que les filles et femmes sont exposées à un continuum de violences qui leur est propre parce qu'elles sont des femmes, qu’elles le sont de manière plus grave et plus récurrente et qu’en ce sens, ces violences sont fondées sur le genre.
Nous, associations féministes, allons également interpeller les instances internationales et les réseaux féministes internationaux pour que la voix des femmes du monde entier soit entendue et que leurs droits soient respectés et faire pression pour qu'une réelle protection soit assurée aux femmes et filles afghanes et à leur famille.
En tant qu’expertes de terrain et en concertation avec les militantes et les associations féministes afghanes, nous demandons également à être consultées, tant en ce qui concerne le sort des filles et femmes afghanes récemment accueillies en Belgique que celles résidant en Afghanistan.
Nous, associations féministes, nous, militantes, nous, femmes, nous nous tenons aux côtés de nos sœurs afghanes et ne nous tairons pas face aux régressions sociales et économiques dont sont déjà victimes les femmes afghanes, aux féminicides et aux crimes contre les femmes qui risquent d’arriver si la communauté internationale ne prend pas la mesure du danger qu’encourent les femmes et filles afghanes ainsi que leur famille.
Pour la coupole Alter Egales,
- ACRF – Femmes en milieu rural
- Amnesty International Belgique francophone, Dominique Deshayes, coordinatrice Droits des Femmes
- Arab Women’s Solidarity Association-Belgium (AWSA-Be)
- Brise Le Silence ASBL, Pascale Urbain présidente, Fabienne Bertens membre du CA, Eley Lamberti et Guylène O. Stagiaire art-thérapeute
- BruZelle, Veronica Martinez
- La Caravane Pour la Paix et la Solidarité ASBL
- Le Centre de Prévention des Violences Conjugales et Familiales, Sabine Marchetti
- CERE ASBL, Annick Faniel
- Le Collectif des Femmes de Louvain la Neuve, Amancay Egas
- Le Collectif contre les Violences familiales et l'Exclusion (CVFE)
- Le Collectif OXO
- Le Comité Internacional Peruano CIP ASBL
- Le Conseil des Femmes Francophones de Belgique (CFFB)
- Corps écrits
- Le Conseil Wallon de l’Egalité entre Hommes et Femmes, Maryse Henrix,
- Le Déclic ASBL Vie Féminine Charleroi - Thuin
- La Fédération AMA
- La Fédération Laïque de Centres de Planning Familial (FLCPF)
- La Fédération des maisons médicales et Les collectifs de santé francophones asbl (FMM)
- Femmes de Droit ASBL
- Les Femmes Prévoyantes Socialistes et la Fédération des Centres de Planning Familial des Femmes Prévoyantes Socialistes
- Les Femmes Prévoyantes Socialistes Ixelles
- Femmes et Santé
- La FILE ASBL
- Le GAFFI ASBL, Anne Iwens, Directrice
- Le Groupe pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles féminines (GAMS Belgique)
- Le Groupe SIREAS
- JUMP Solutions for Equity at Work
- La Palabre
- Théâtre Le 140, Astrid Van Impe, directrice
- Maison Plurielle ASBL
- La Marche Mondiale des Femmes, Marcela de la Peña
- Le Monde Selon les Femmes
- Mouvement pour l'Egalité entre les Femmes et les Hommes ASBL, Donatienne Portugaels
- L’Observatoire féministe des violences faites aux femmes
- La Plateforme citoyenne pour une naissance respectée
- Le Poisson sans bicyclette ASBL
- Le Réseau Européen des Femmes Migrantes (ENoMW)
- Siempre NGO, Thamara Cruz
- Synergie Wallonie pour l’Egalité entre les Femmes et les Hommes ASBL, Reine Marcelis
- Touche Pas à Ma Pote ASBL
- La Voix des Femmes
- Betty Batoul, femme de paix de Belgique
- Delphine Rochus
- Geneviève Noirhomme, Pair-aidante auprès des femmes victimes de violences
- Mujing Rukambu
- Nadine Plateau
1 Alter Egales est une assemblée participative constituée d’associations de femmes et féministes de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Belgique https://alteregales.cfwb.be
3 Cf. la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés (1951), telle que modifiée par son protocole de 1967 ; la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (« CEDEF », 1979) et son protocole facultatif (1999) ; la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant (1989) et ses protocoles facultatifs (2000) ; les dispositions pertinentes du Pacte mondial des Nations Unies pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (2018) ; les "Directives sur la protection internationale de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés : Persécution fondée sur le genre dans le contexte de l'article 1A(2) de la Convention de 1951 et/ou de son Protocole de 1967 relatif au statut des réfugiés", du 7 mai 2002 ; La Recommandation Rec(79)10 concernant les femmes migrantes ; la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210, « Convention d'Istanbul », 2011); la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (STE n° 5, 1950) et ses Protocoles, à la lumière de la jurisprudence pertinente de la Cour européenne des Droits de l'Homme ; la Charte sociale européenne (STE n° 35, 1961, révisée en 1996, STE n° 163) ; la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STCE n° 126, 1987) ; la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE n° 197, 2005), la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (STCE n° 201, 2007) ; la Stratégie du Conseil de l'Europe pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2018-2023 et de son objectif stratégique de protection des droits des femmes et des filles migrantes, réfugiées et demandeuses d'asile ; le Plan d'action du Conseil de l'Europe sur la protection des personnes vulnérables dans le contexte des migrations et de l'asile en Europe (2021-2025) ; les Recommandations suivantes du Comité des Ministres aux États membres du Conseil de l'Europe : Rec(2002)5 sur la protection des femmes contre la violence.
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